Sénégal  : le franc CFA, vestige du colonialisme03/04/20242024Journal/medias/journalarticle/images/2024/04/CFA-S%C3%A9negal.jpg.420x236_q85_box-0%2C45%2C480%2C315_crop_detail.jpg

Dans le monde

Sénégal 

le franc CFA, vestige du colonialisme

« Il n’y a pas de véritable souveraineté s’il n’y a pas de souveraineté monétaire », a déclaré Diomaye Faye, le vainqueur de l’élection présidentielle au Sénégal. Il affirme ainsi vouloir que son pays sorte du franc CFA, ce vestige du colonialisme français.

Illustration - le franc CFA, vestige du colonialisme

Le franc CFA a été créé en 1945. Il signifiait à l’époque le franc des Colonies Françaises d’Afrique. Après les indépendances, le sens des initiales a changé, mais pas la réalité de cette monnaie contrôlée par l’ancienne puissance coloniale. Désormais il s’appelle le franc de la Communauté Financière Africaine.

La France a imposé cette monnaie commune pour maintenir un contrôle économique de ce qu’elle considérait comme son pré carré. Les capitaux français placés dans l’un des quinze pays concernés ont un avantage par rapport à leurs concurrents impérialistes. Ils ne sont pas soumis aux variations des taux de change puisque le franc CFA est indexé sur l’euro, après l’avoir été sur le franc. Ils peuvent circuler facilement entre ces anciennes colonies et la France, sans non plus avoir à subir le contrôle des changes.

Avant les changements de 2019, les États africains devaient verser la moitié de leurs réserves de change au Trésor français et des représentants de l’État français siégeaient dans les banques centrales censées gérer ce franc CFA, dont l’impression se fait en France. Tout cela permettait à l’État français d’avoir la main sur les politiques budgétaires de ces États, de contrôler les prix et les salaires, d’imposer la rigueur au nom du maintien du taux fixe. Ainsi en 1994, le Premier ministre français Balladur a pu décider une dévaluation de 50 % du franc CFA. Du coup, du jour au lendemain, les populations ont connu le doublement des prix des biens de consommation et la chute dramatique de leur niveau de vie déjà difficile.

En 2019, Macron a signé un nouvel accord monétaire avec l’organisme qui gère le franc CFA des huit pays d’Afrique de l’Ouest. Dans la lignée des manoeuvres habituelles de la Françafrique, le premier point de cet accord visait à changer le nom de la monnaie en fonction de la zone géographique concernée ! Le reste a allégé en partie le contrôle de la France sur la monnaie, pour tenir compte de l’évolution économique.

Cette monnaie est une survivance coloniale, qui mérite de disparaître. Mais ce n’est pas cette mesure qui permettra de desserrer le nœud coulant de l’impérialisme autour de l’économie des pays africains. Depuis 1958, la Guinée Conakry, la Mauritanie, Madagascar ont quitté le franc CFA, sans sortir pour autant de la pauvreté et de la dépendance économique.

En effet la domination impérialiste ne tient pas seulement à la mainmise sur la politique monétaire des pays, et le franc CFA n’a été qu’un moyen pour la France de garder des relations privilégiées avec les pays concernés en en écartant le plus possible les autres puissances. La misère dans laquelle sont plongées les populations africaines est liée à la domination des multinationales sur les ressources et la production, l’économie et le marché mondial, en écrasant l’économie des pays africains et leur population.

La sortie du franc CFA pourra permettre à des bourgeois africains de décider de façon plus autonome des manipulations monétaires dans leur pays et peut-être de diversifier leurs relations avec l’extérieur de façon un peu plus avantageuse pour eux. Mais cela ne mettra pas fin à la pauvreté et à l’exploitation. Pour cela, il faudra que les travailleurs ne s’en prennent pas seulement à la couleur de la monnaie dans laquelle ils sont mal payés, mais à leurs exploiteurs eux-mêmes, africains et occidentaux.

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