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Brochure

Meeting de campagne du 29 mars 2019 : discours de Nathalie Arthaud

Au sommaire de la brochure

Sommaire

    Notre choix de la classe ouvrière

    Nous nous adressons en priorité à notre classe sociale, la classe ouvrière, celle des exploités, c’est-à-dire des salariés qui n’ont que leur travail pour vivre. Et le programme qu’a présenté Jean-Pierre correspond à ses intérêts généraux.

    Cela signifie-t-il que nous ignorons toutes les autres victimes du système capitaliste ? Bien sûr que non ! Nous ne négligeons pas les ravages du racisme et du sexisme. Nous dénonçons le sort inhumain réservé aux migrants. L’avenir de la planète fait partie de nos préoccupations essentielles.

    Mais nous faisons le choix de militer d’abord en direction des travailleurs parce que c’est la seule classe qui peut supprimer l’exploitation de l’homme par l’homme et les mille et une injustices qui en découlent.

    Ce n’est pas que les travailleurs aient une conscience révolutionnaire supérieure. En temps normal, ils ne sont pas plus combatifs que d’autres catégories sociales. Quand il n’y a pas de luttes collectives, ils acceptent leur sort, ils s’adaptent à la société et épousent les valeurs bourgeoises dominantes, l’individualisme, la réussite personnelle, le nationalisme.

    Mais les travailleurs ont ceci de particulier qu’ils sont à l’intérieur même des citadelles capitalistes qu’il faut prendre. Dès qu’ils entrent en lutte pour leurs intérêts, ils touchent au cœur de la société bourgeoise : ils touchent aux profits et à la domination de la classe capitaliste. Cela leur donne un levier incomparable pour peser sur les maîtres de la société.

    A chaque fois que la classe ouvrière s’est massivement mobilisée à partir des entreprises, en faisant grève, et parfois en les occupant, ce fut le cas en mai-juin 1936 et en 1968, elle a fait pression sur la bourgeoisie.

    Avec le mouvement des gilets jaunes on a entrevu les capacités de révolte et de mobilisation des classes populaires. Mais on a vu aussi que manifester les samedis, occuper les ronds-points et briser quelques vitrines gêne peut-être le gouvernement, mais très peu le grand patronat. Ce que les Peugeot, Arnault, Michelin craignent par-dessus tout, c’est que les travailleurs n’acceptent plus de se faire voler le fruit de leur travail et contestent leur domination sur les grandes entreprises.

    La classe ouvrière n’est pas seulement la mieux placée pour mener le combat, elle est notre seul espoir de transformation de la société car elle est porteuse d’une nouvelle organisation économique : une économie fondée sur la gestion collective des grands moyens de production.

    C’est le capitalisme lui-même qui a rassemblé les travailleurs dans les grandes entreprises, qui leur a appris à travailler ensemble et les a rendus interdépendants. Rien ne se produit sans la coopération de centaines, de milliers de travailleurs : le travail est de plus en plus collectif, de plus en plus socialisé mais l’appropriation des richelles est individuelle.

    Eh bien, les salariés qui font tourner collectivement l’économie ne travailleront pas éternellement pour le compte d’une minorité de parasites irresponsables ! Tôt ou tard ils chercheront à s’en libérer et ils construiront une organisation économique sans bourgeoisie, sans exploitation, sans classe sociale. Une organisation économique et sociale supérieure au capitalisme, plus rationnelle, mieux organisée et surtout destinée à répondre aux besoins immédiats et futurs de toute l’humanité.

    Le programme : le ciment de la conscience de classe

    Notre slogan de campagne, « Contre le grand capital, le camp des travailleurs » est un objectif, une perspective politique pour changer la société. Tout reste à faire parce que, depuis bien des années, le camp des travailleurs n’a pas d’existence politique en ce sens que la conscience de classe a considérablement reculé.

    Tous les salariés ont pour point commun de devoir vendre leur force de travail manuelle et intellectuelle à ceux qui possèdent les moyens de production. Ils ont pour point commun d’être dépendants d’un capitaliste pour leur emploi, pour leur salaire et pour leur retraite future.

    Mais même dans ce monde des exploités, les situations sont très diverses. Il y a ceux à qui on donne un travail, et ceux qui n’ont même pas la possibilité de se faire exploiter, les chômeurs. Il y a les travailleurs qui sont à la retraite ou en invalidité.

    Et le fait est qu’un ingénieur, un cadre supérieur ou un pilote d’avion ne vit pas dans les mêmes quartiers et ne partage pas la vie des ouvriers, des postiers ou des aides-soignantes. Un salarié payé 3000 € par mois qui peut compter sur l’héritage familial lui assurant une certaine sécurité n’a pas les mêmes soucis ni le même sentiment d’injustice et d’urgence qu’un salarié payé au smic, un intérimaire ou un chômeur.

    Et combien de femmes et d’hommes, parce qu’ils échappent au travail en usine, ne se sentent pas faire partie de la classe ouvrière ? Et c’est sans oublier l’histoire personnelle de chacun, les différences d’origines, de nationalités et de sexe qui recouvrent toujours des préoccupations particulières.

    C’est sur ces différences que la bourgeoisie et ses politiciens jouent en permanence pour diviser le monde du travail. Alors oui, comme l’a dit Jean-Pierre, il faut un ciment pour relier les millions d’exploités. Ce ciment, c’est la conscience de nos intérêts collectifs. Ce ciment, c’est la conscience de classe forgée, incarnée et propagée dans un programme. Le programme que Jean-Pierre vient de présenter, un programme de lutte, pour les travailleurs confrontés à la crise, à la faillite de ce système capitaliste.

    La classe ouvrière doit prendre la tête du combat et entraîner la petite bourgeoisie

    Les salariés ne sont pas les seules victimes du capitalisme. La concurrence et le marché font en permanence beaucoup de dégâts dans les rangs de la petite bourgeoisie. En témoignent l’extinction des petits commerces de centres villes au profit des grandes surfaces, la disparition des librairies écrasées par le rouleau compresseur d’Amazon… Le fonctionnement normal de la concurrence et du capitalisme s’apparente à une jungle où le grand capital écrase le petit.

    Et avec la crise, la paupérisation d’une partie de la petite bourgeoisie s’est accélérée et aggravée. D’abord du fait de la chute du pouvoir d’achat des classes populaires qui met en difficulté nombre de coiffeurs, de garagistes, de fleuristes… Et puis parce que la pression du grand capital est de plus en plus forte. Nombre de petits commerçants sont étranglés par les intermédiaires, par les transformateurs, par les banques. La pression à la compétitivité des grands groupes frappe aussi les sous-traitants ou les fournisseurs dès qu’ils sont moins puissants. Combien de petits agriculteurs en font les frais ?

    Alors oui, des raisons de se révolter, il y en a aussi dans les rangs de la petite bourgeoisie. Les travailleurs qui sont à leur compte ont d’ailleurs été nombreux à enfiler le gilet jaune. Et ils peuvent exprimer autant de rage et de révolte que bien des ouvriers et des chômeurs.

    Mais la petite bourgeoisie, avec ses sommets qui se confondent à la bourgeoisie et ses couches inférieures parfois très pauvres, est écartelée politiquement. L’entrepreneur à la tête d’une start-up ou d’une PME de 100 salariés qui espère grossir est porté à partager les perspectives anti-ouvrières de la grande bourgeoisie. Pas forcément la coiffeuse qui travaille seule ou le maçon qui emploie deux ou trois salariés et dont l’activité dépend directement du pouvoir d’achat des classes populaires.

    Eh bien entraîner dans le camp des travailleurs une partie d’entre eux sera tout l’enjeu des luttes futures. Si les travailleurs se battent, ils peuvent et doivent avoir une politique pour se faire le porte-parole de toutes les victimes du grand capital.

    En mettant sous contrôle les grands groupes industriels et financiers, en faisant la lumière sur les circuits de l’argent, en montrant les marges que les plus gros se font sur les petits, en dévoilant les taux drastiques imposés par les banques aux plus fragiles alors qu’elles prêtent avantageusement aux plus riches, les travailleurs mobilisés inspireront confiance et montreront qu’ils représentent une alternative au grand capital.

    Alors oui, le combat de la classe ouvrière ouvre des perspectives non seulement pour les exploités mais pour l’ensemble des classes populaires. Lutter pour les exigences élémentaires de la classe ouvrière, c’est se battre pour que l’ensemble des producteurs ne soient pas poussés vers la déchéance. C’est sauver ce que la société a de plus vital. C’est se battre pour l’avenir de toute la société !

    Ecologie : La classe capitaliste est irresponsable, la soumettre au contrôle est une nécessité vitale

    Il s’agit de l’avenir de la société et de la planète. Parce que s’il y a un problème qui pose de façon flagrante la nécessité de contrôler ce que font ces grands groupes et les choix qu’ils prennent, c’est bien la question écologique.

    Le gouvernement et nombre de défenseurs de l’environnement la posent en termes individuels. Chacun serait responsable de la situation. On consommerait mal et trop… il faudrait que chacun adopte les petits gestes qui peuvent sauver la planète.

    Si nous raisonnons ainsi, nous courons droit à la catastrophe. Car il s’agit d’abord et avant tout d’un problème collectif. C’est le problème de l’énergie, des déplacements, de la gestion des ressources naturelles… Et c’est la question de ce que l’on produit, en quelle quantité et comment. Et qui décide dans tous ces domaines ? Les grands groupes capitalistes dont la seule ligne de conduite en matière économique ou écologique c’est « Après moi, le déluge ! » Parce qu’il n’y a que la concurrence et le profit qui comptent pour eux !

    On le mesure à chaque catastrophe écologique. Prenez le barrage minier qui s’est rompu en janvier au Brésil. La coulée de boue a enseveli maisons et villages, a fait 400 morts et disparus et a pollué toute une vallée pour des décennies. Depuis 2001, il y avait déjà eu 7 cas de ruptures de barrages. C’était une catastrophe annoncée. Ce choix d’exploiter des mines de fer à ciel ouvert, par lavage avec de l'eau parce que cela coûte moins cher, avait été dénoncé. Rien n’a été fait ! Et on peut en dire autant de toutes les grandes catastrophes, comme celle de Fukushima au Japon; comme celle, en novembre dernier, de Camp Fire, cet incendie meurtrier en Californie qui, parce que les lignes à hautes tensions n’étaient pas entretenues, a rasé Paradise, une ville de 27 000 habitants !

    Et puis, à côté de ces catastrophes, il y a la pollution ordinaire, la destruction de la planète à petit feu, avec la déforestation, la pollution des nappes phréatiques, le réchauffement climatique, le "retraitement" des déchets revendus aux pays pauvres qui transforme d’immenses zones d’Afrique en dépotoirs dangereux. Tout cela, encore une fois, parce que l’activité économique est livrée aux lois de la propriété privée, du marché et du profit.

    Alors qu’il faudrait user d’interdictions et de mesures contraignantes, les groupes capitalistes sont incités à faire autrement… et la situation s’aggrave. Les gouvernements renâclent à interdire et contraindre parce qu’ils ne veulent pas gêner leurs champions industriels dans la guerre économique, parce qu’ils sont prisonniers non seulement des lobbys mais du fonctionnement même de l’économie capitaliste.

    Cette soumission à l’ordre social conduit y compris certains écologistes, qui sur une liste écolo, qui sur une liste macroniste, à nous expliquer que l’écologie est tout à fait compatible avec les lois du marché. Mais ce sont bien ces lois du marché qui ont conduit les fabricants à inonder la planète de plastique ! Ce sont les lois du marché qui font qu’Amazon détruit chaque année plus de trois millions de produits manufacturés neufs, parce que les détruire revient moins cher que les stocker !

    Au Brésil, pendant la Grande dépression des années 1930, les compagnies de chemin de fer brûlaient du café dans leurs locomotives pour écouler des invendus. Et en Californie on arrosait de pétrole des oranges pour éviter qu’elles soient mangées. C’est resté le symbole du gâchis auquel donnent lieu les crises du capitalisme avec leur lot d’usines fermées et de nouveaux chômeurs. Mais ce gâchis, il est permanent, ne serait-ce que du fait que des millions de femmes et d’hommes au chômage sont condamnés à l’inactivité.

    Le préalable pour maîtriser l’impact de l’activité économique sur l’environnement est d’empêcher les grands groupes de nuire.

    Sous le commandement de la bourgeoisie, les multinationales servent à piller la planète et exploiter des dizaines de milliers de travailleurs à travers le monde. Sous la direction démocratique de la collectivité, elles seront des outils fabuleux pour planifier ce qui doit l’être et organiser l’économie.

    Sans exproprier la bourgeoisie et en finir avec la propriété privée des grands moyens de production à l’échelle internationale, on pourra toujours parler d’écologie, ce seront des paroles en l’air. Pour avoir une chance de préserver la planète et la vie sur terre, il faut que l’humanité puisse décider de ce que l’on produit et réfléchir à la meilleure façon de le faire, en toute conscience et en prenant en considération tous les aspects des problèmes qui se posent, de la production de l’énergie à celle des modes de consommations.

    C’est l’intérêt de la classe ouvrière, c’est l’intérêt de la société humaine !

    ***

    Et puisque nous sommes dans ces élections européennes et que l’on parle d’Europe et de frontières, je voudrais rajouter que l’écologie nécessite d’enlever ses œillères nationales. En matière environnementale, il n’y a pas de protectionnisme national ou européen qui vaille. Il n’y a qu’une planète, qu’une seule atmosphère, qu’un même vaste océan et les émissions de gaz à effet de serre n’importe où dans le monde entrainent le réchauffement de toute la planète.

    Alors on ne peut sûrement pas se satisfaire de déplacer les problèmes comme on le fait avec les vieux tankers qui sont désossés sur certaines plages du Bangladesh ou lorsque les vieux Diesel qui ne peuvent plus rouler en France empoisonnent les rues de Lagos ou d’Abidjan.

    Pour préserver la planète il faudra que les travailleurs prennent le pouvoir et se coordonnent à l’échelle du monde… Alors, à bas le nationalisme ! Et vive la perspective d’une véritable organisation économique respectueuse des besoins des peuples et de la planète !

    La bourgeoisie et le capitalisme ne peuvent pas répondre aux défis posés à l’humanité 

    Les communistes révolutionnaires sont les seuls à avoir pour objectif et pour programme le renversement du système politique de la bourgeoisie et du capitalisme. Les politiciens de la bourgeoisie n’imaginent pas d’autre ordre social et ils prétendent le moraliser et le réorienter sur une voie sociale et écologique. Ils tirent des plans sur la comète, nous parlent d’investissements verts, de transition écologique… C’est vain ! La bourgeoisie et son système capitaliste sont devenus des poids morts, des obstacles au développement.

    Il est loin le temps où Marx avait rendu hommage à la classe capitaliste, en soulignant qu’elle faisait, je cite « la preuve de ce dont est capable l’activité humaine » ! Aujourd'hui la bourgeoisie n’est plus capable de grandes idées, ni de grands progrès.

    La crise économique

    Investir dans la production utile, ne l’ intéresse que si les profits sont garantis. Et c’est de moins en moins le cas. Que ce soit pour Ford, Ascoval ou Arjowiggins, le gouvernement a cherché un repreneur. Il n’en a pas trouvé qui soit prêt à aligner suffisamment de capitaux. Ce n’est pas que les capitalistes manquent d’argent ! De l’argent ils en ont, ça dégouline même de tous les côtés. Mais ils ne veulent pas investir leurs capitaux dans la production parce que les perspectives de croissance des profits ne sont plus suffisantes, du fait de la saturation des marchés et de la concurrence féroce.

    Le capitalisme est englué dans ses propres contradictions. Il a pour moteur la recherche de profits, profits qui se réalisent en laminant les salaires. Ce faisant, ils réduisent le pouvoir d’achat, les débouchés et donc les futurs profits. Le capitalisme est né avec cette contradiction fondamentale et tout au long de son histoire il a été secoué par des crises récurrentes. Et comme n’importe quel organisme qui vieillit, il s’en remet de plus en mal.

    La crise que nous connaissons a commencé dans les années 1970 et on s’y enfonce avec une financiarisation de plus en plus délirante qui donne à l’économie l’allure d’un bateau ivre. Car oui, la financiarisation est l’autre caractéristique de ce capitalisme agonisant. A la différence de la sphère productive, la finance et la spéculation offrent, elles, des débouchés illimités et des dizaines, des centaines de milliards y affluent tous les jours. En plus d’être un immense gâchis pour la société humaine, cette économie de casino nous menace d’un nouveau krach, que de nombreux experts de la bourgeoisie annoncent plus dévastateur encore que celui de 2008.

    Le progrès ? Quel progrès ?

    Oh, bien sûr la vie continue, il y a des progrès scientifiques, des innovations. Il y a toujours des nouveaux produits. Et c’est la grande force des capitalistes, ils savent faire rêver, ils savent créer des nouveaux besoins et de nouvelles habitudes sociales. La connexion internet est devenue aussi indispensable que la machine à laver. Mais à côté de cela, les familles ont toujours du mal à se loger, s’acheter de la viande, du poisson, du fromage. Elles ne peuvent pas se payer une mutuelle ou le permis de conduire des enfants.

    Le smartphone a pénétré jusque dans les régions d’Afrique ou d’Asie qui n’ont toujours pas accès à l’électricité et l’eau courante. On nous parle aujourd'hui d’intelligence artificielle. Les dirigeants des pays riches parlent de relancer la conquête spatiale. Et ils disent ne pas avoir d’argent pour maintenir les hôpitaux et les maternités de proximité, pour rénover les chemins de fer, pour entretenir les routes et les ponts.

    Pour ceux qui disposent de quelques millions, les billets sont en vente pour faire le tour de la lune en 2023, et ils peuvent commencer à réserver les premiers prototypes de scooters volants… et à l’autre pôle la famine et la malnutrition perdurent, le travail des enfants continue, il n’y a jamais eu autant de femmes et d’hommes réfugiés et enfermés dans d’infâmes camps, des millions de travailleurs sont exploités dans des conditions proches de l’esclavage et, même dans les pays riches, la condition ouvrière a tellement reculé qu’aucun travailleur n’est assuré de son avenir !

    Ce n’est pas ça le progrès ! Le progrès ce serait que la société assure à ceux qui la font tourner de quoi vivre dignement. La bourgeoisie ne fait plus progresser la société, elle la décompose !

    Alors le problème n’est pas de se battre pour un meilleur partage des richesses. Il faut décider quelle richesse on produit, dans quelles conditions et au profit de qui. Il faut que ce soit la société qui contrôle et gère les moyens de production.

    De toutes façons, il n’y aura pas de meilleur partage des richesses sans cela. Car ce que ne disent pas les réformistes en tout genre qui usent et abusent de cette belle formule, c’est que pour partager, il faut commander. Et tant que la bourgeoisie commande, elle ne partagera rien et ne laissera que des miettes. C’est comme ça que nous en sommes aujourd'hui à cette situation délirante où 26 personnes possèdent autant que la moitié la plus pauvre de l’humanité.

    La bourgeoisie est depuis longtemps une classe réactionnaire. Il faut avoir pour objectif de la renverser et de la remplacer à la tête de la société.

    Le rôle réactionnaire de la bourgeoisie et la construction de l’Union Européenne

    On le mesure avec l’Union Européenne, la bourgeoisie pourrit tout, elle pervertit tout, y compris les idées et les perspectives progressistes.

    Parce que oui, unifier réellement l’Europe serait la moindre des choses. Les frontières européennes sont plus que dépassées ! L’activité de la moindre entreprise nécessite des échanges internationaux. Combien de familles mêlent plusieurs origines ? L’histoire, la vie économique et sociale, la culture ont fondu les peuples européens dans un même destin. Mais force est de constater que les politiciens aux ordres de la bourgeoisie sont incapables d’unifier réellement l’Europe.

    Alors que les capitalistes européens y ont intérêt. Ils étouffent dans leurs frontières nationales depuis longtemps. Entre 1870 et 1914, ils se sont partagé le monde en se taillant des empires en Afrique et en Asie pour s’assurer un accès aux matières premières et débouchés. Pour les mêmes raisons, ils ont jeté le monde entier dans deux guerres monstrueuses.

    C’est en 1951 sous la pression des nécessités économiques de la reconstruction de l’après-guerre et sous l’impulsion de la bourgeoisie américaine que les bourgeoisies européennes ont fini par se mettre autour d’une table pour commencer à construire un marché commun autour du charbon et de l’acier. Cela fait plus de 60 ans. 60 ans que la bourgeoisie de chaque pays est écartelée entre la volonté d’accéder à un marché plus vaste et l’assurance d’être protégé par son Etat national. 60 ans qu’ils avancent et reculent au gré de leurs rapports de force et de leurs intérêts divergents.

    Et aujourd'hui, ça recule. En témoignent le Brexit, la montée de l’extrême droite et l’emprise croissante des idées réactionnaires.

    Aujourd’hui les Britanniques en sont à faire le tour des pharmacies pour stocker de l’insuline et d’autres médicaments fabriqués en Europe de peur qu’il y ait une rupture d’approvisionnement. Le Brexit avait été présenté comme le retour à l’indépendance du pays, le gouvernement conservateur en est réduit à acheter des réfrigérateurs et les douaniers à simuler les énormes embouteillages de poids lourds qui ne manqueront de se produire si les contrôles aux frontières sont rétablis. Quant aux députés, ils sont contre le deal, contre le no-deal et contre l’annulation du Brexit ! C’est le théâtre de guignol à la télé !

    Et nous ne sommes pas à l’abri d’un tel retour en arrière. Les mêmes démagogues qui sont parvenus à abuser une partie des électeurs britanniques sont à l’œuvre ici. Ils sont portés par la crise économique et sociale, par le pourrissement du système politique… et par le rejet légitime de l’UE par les travailleurs.

    Parce qu’en effet, cette UE n’a rien fait pour les exploités ! Il y a toujours eu des politiciens pour nous faire miroiter une Europe sociale. Mais qu’est-ce qui a été fait pour tirer vers le haut les salaires et les droits des plus exploités d’Europe ? Rien ! Les Bulgares ont un Smic qui plafonne à 260 euros. Les Roumains travaillent 500 heures de plus que nous par an. Et quand il s’agit d’harmoniser les choses, c’est toujours au détriment des travailleurs. Par exemple aujourd'hui, le gouvernement se sert de ce que la retraite est à 65 ans dans la plupart des pays européens pour nous faire accepter de nouveaux reculs.

    Quant aux droits des femmes, l’UE n’a jamais fait pression sur les pays les plus réactionnaires pour les faire progresser, ne serait-ce que le droit élémentaire du droit à l’avortement qui est toujours interdit à Malte et qui est en train de reculer en Pologne.

    L’UE nous a été vendue comme un espace de libre circulation ouvert sur le monde et ils ont construit une forteresse dont les barbelés et les murs sont toujours plus hauts. Ils ont fait grossir le nombre d'hommes, de femmes et d'enfants contraints de risquer leur vie pour tenter leur chance en Europe. Ils ont transformé la Méditerranée en cimetière de migrants.

    Même à l’intérieur de l’espace Schengen, les frontières nationales n’ont pas disparu. Aujourd'hui elles réapparaissent physiquement, avec des policiers qui filtrent ou stoppent les passages, procèdent aux contrôles et aux fouilles. Le but est d’empêcher les migrants de passer d’un pays à un autre, mais la frontière de Vintimille, par exemple, est redevenue une frontière pour tout le monde.

    Alors oui, l’Europe construite par et pour la bourgeoisie n’est pas belle à voir. Mais les Etats nationaux ne le sont pas plus ! Toutes les institutions de la bourgeoisie sont conçues comme des machines de guerre contre les travailleurs et les plus faibles. Notre objectif n’est pas de dénoncer telle ou telle institution de la bourgeoisie, et c’est encore moins de réhabiliter les frontières nationales. Tous ceux qui se cramponnent à des frontières nationales datant de l'époque des calèches et de la marine à voile, sont des réactionnaires. L’avenir, c’est l’unité de l’Europe, une Europe sans frontière et ouverte sur le monde. Et elle ne pourra être réalisée que par les travailleurs au pouvoir !

    Les revendications démocratiques et l'Europe

    Nous militons pour le renversement de la bourgeoisie et notre projet pour l’Europe est celle des Etats-Unis socialistes d’Europe, premier pas vers une république socialiste universelle, premier pas pour réorganiser l’économie et la société à l’échelle où se déroule la vie économique et sociale.

    Mais tant que perdure l’ordre social capitaliste, il faut mener le combat dans le cadre de l’UE comme dans le cadre des Etats qui sont dominés par la bourgeoisie. Et nous nous battrons pour renforcer les droits et la solidarité des travailleurs. Pour que les droits sociaux, les salaires et les droits des femmes soient alignés par le haut.

    Les frontières enferment les habitants des pays pauvres dans leurs prisons de misère. Nous défendons la libre circulation et le droit pour tous les migrants de s’installer où ils le décident.

    Notre projet immédiat pour l'Europe est un projet pour les travailleurs d'Europe, pour les exploités, pour qu'ils ne se laissent pas faire et pour qu’ils fassent bloc. Tous les travailleurs d’Europe ainsi que nos sœurs et nos frères de classe algériens, marocains et tunisiens qui sont de l’autre côté de la Méditerranée ont rigoureusement les mêmes intérêts. Partout ils sont confrontés aux licenciements, au chômage de masse, à la démolition des services publics, à la baisse du pouvoir d’achat. Il faut qu’ils se défendent ensemble.

    Les frontières n’ont jamais arrêté la crise. Elles n’arrêtent pas la rapacité des groupes capitalistes. À bas les licenciements, augmentation des salaires et des pensions, contrôle sur les affaires des capitalistes, ce sont des revendications que l’on peut crier dans toutes les langues et dans tous les pays ! Alors à bas les frontières qui séparent les travailleurs !

    Militer pour faire avancer le sort des travailleurs, c’est militer pour l’expropriation de la bourgeoisie

    Dans la situation de crise dans laquelle nous sommes, les travailleurs ne parviendront pas à préserver leurs conditions d’existence sans une lutte âpre et difficile, une lutte qui les amènera forcément à remettre en cause le pouvoir de la bourgeoisie. Eh bien, il faut, dès aujourd’hui, s’en convaincre : la lutte pour les revendications quotidiennes immédiates et celle pour l’émancipation totale des travailleurs relèvent d’un seul et même combat. Militer pour les intérêts des travailleurs, c’est militer pour la révolution sociale. Les deux sont indissociables !

    La révolution ne dépend pas de notre capacité de convaincre les masses de la faire. Lorsque les travailleurs se mobilisent, ils ne se lèvent pas pour faire la révolution. Ils y sont amenés par la force des évènements, par la lutte des classes. La première étape, c’est que les travailleurs relèvent la tête, affichent leur fierté et leur dignité de travailleurs. Mais dès que la lutte sera enclenchée, leur contestation du pouvoir de la classe bourgeoise se posera et il faudra que les plus combatifs et les plus conscients montrent le chemin : celui de l’expropriation de la classe capitaliste.

    L’expropriation de la bourgeoisie est une nécessité.

    Toute la société est bloquée parce que les capitaux se concentrent dans les mains d’une toute petite minorité et sont intouchables, inutilisables pour la collectivité. Au nom de la propriété privée, il est interdit de contrôler l’usage fait de ces capitaux. Il est interdit de les réquisitionner quand bien même la société en aurait un besoin urgent pour investir dans le logement, les transports, la santé ou l’éducation.

    La bourgeoisie a le droit de décider, seule, de choix engageant toute la société parce qu’elle est propriétaire des capitaux investis dans les grandes entreprises. Eh bien il faut lui enlever ses capitaux, c’est-à-dire l’exproprier.

    Depuis toujours, on nous met dans la tête que le capitalisme, c’est la liberté basée sur la propriété privée.

    Mais la propriété privée, c’est d’abord celle de la bourgeoisie. La propriété privée du monde du travail, elle, elle se réduit à bien peu de choses. Nombre de salariés, d’employés sont dans l’incapacité de s’acheter ne serait-ce qu’une voiture correcte. Et pour acheter un appartement ou une petite maison, beaucoup sont amenés à s’éloigner de leur lieu de travail. Et dès qu’il y a un licenciement ou un « accident de la vie », comme on dit, eh bien on perd tout !

    Derrière ce principe prétendument sacré de la propriété privée, il y a surtout le droit de la bourgeoisie d’exploiter ceux qui n’ont rien et les priver de toute propriété. Et combien de patrons petits et moyens finissent ruinés et expropriés par plus gros qu’eux ?

    Historiquement, la bourgeoisie a exproprié à tour de bras en exploitant et en massacrant des peuples entiers dans la colonisation, en déportant des millions d’êtres humains dans la traite transatlantique. Son économie a chassé les paysans de leurs campagnes. D’une certaine façon, cela continue aujourd'hui avec des centaines de milliers si ce n’est des millions de femmes et d’hommes chassés de chez eux par la misère et les guerres.

    Alors la propriété privée, la libre initiative, c’est la feuille de vigne idéologique de la bourgeoisie qui est la classe qui a le plus exproprié. Le respect de la propriété privée fait partie des chaînes que les travailleurs doivent briser. « Il faut exproprier les expropriateurs », disait Karl Marx, et c’est plus vrai que jamais.

    L'urgence de construire un parti

    Cela peut sembler loin des préoccupations et de ce que les travailleurs sont prêts à faire aujourd'hui. Mais ne craignons pas d’affirmer nos perspectives révolutionnaires. Si nous avons un problème, ce n’est pas celui d’être en avance, c’est celui d’être en retard. Avec la crise nous entrons dans l’âge de la colère et des révoltes sociales. Elles ont déjà commencé !

    Regardez la révolte du peuple algérien, qui se mobilise depuis des semaines, par millions, pour en finir avec un système inique, où une clique de privilégiés s’approprient les ressources de l’Etat ! Ces évènements ouvrent bien des perspectives. Mais il peut y avoir des millions de femmes et d’hommes dans la rue, prêts à beaucoup de sacrifices sans qu’ils trouvent le chemin pour défendre leurs intérêts. Contester l’ordre établi ne dit pas ce qu’il faut mettre à la place. Cela ne dit pas aux travailleurs comment ils peuvent s’organiser ni derrière qui.

    Dans toutes les mobilisations un peu profondes, les travailleurs se trouvent mélangés à bien d’autres catégories sociales dont les objectifs sont divers voire opposés à leurs intérêts. Pour les exploités, il faut réussir à repérer les vrais et les faux amis, s’organiser pour peser sur les évènements et faire respecter leurs intérêts. C’est un combat qui est toujours difficile. Et il l’est plus encore lorsque les travailleurs ne sont pas préparés politiquement.

    Aujourd'hui en Algérie, la grande bourgeoisie dispose avec l’Etat d’une série d’appareils. La présidence, les services secrets et surtout l’armée peuvent être l’enjeu de rivalités entre clans pour le pouvoir, l’influence, les postes et les positions. Mais ils ont tous été sélectionnés, dressés pour maintenir la stabilité de l’ordre social, c’est-à-dire pour préserver l’ordre capitaliste. A commencer par l’armée.

    La clique autour de Bouteflika se divise peut-être, mais bien des postulants pour le remplacer offriront leurs services et proposeront des solutions pour désamorcer la mobilisation populaire par la tromperie et, au besoin, par la violence.

    A chacune des initiatives destinées à préserver les intérêts politiques et les privilèges économiques de la bourgeoisie, il faudrait que la classe ouvrière puisse opposer sa propre politique. Le rôle d’un parti ouvrier révolutionnaire serait d’incarner cette politique de classe et de proposer aux travailleurs la politique correspondant aux nécessités et au rapport de forces du moment.

    C’est en jouant ce rôle que même une petite organisation peut devenir un parti, et le parti peut être reconnu par la classe ouvrière comme son état-major.

    La mobilisation populaire en Algérie est massive, mais nul ne peut préjuger de sa profondeur, ni de la possibilité de la classe ouvrière d’y jouer un rôle indépendant. Comme ici, il n’existe pas en Algérie de parti communiste révolutionnaire ayant une influence sur une partie même très minoritaire du prolétariat. Or, l’existence d’un parti de classe, même embryonnaire, est un élément du rapport de force et surtout de sa dynamique.

    L’ampleur de la mobilisation des Algériens et surtout sa soudaineté, qui plus est dans un pays qui a connu moult répressions, ont surpris tous les observateurs. Parce que les grandes révoltes populaires ne s’annoncent pas, elles éclatent.

    Et disons-nous bien que cela peut éclater n’importe où avec la même soudaineté, y compris dans un pays impérialiste riche comme la France, mais où la crise du capitalisme appauvrit une partie de plus en plus importante de la population. Et là aussi, il est nécessaire et urgence de construire un parti.

    Tant que les classes populaires ne sont pas massivement en mouvement, l’existence d’un parti pour les travailleurs en lutte peut apparaître comme pure spéculation. Mais dans le feu de l’action, tout se précipite.

    Si les évènements entraînent de larges masses ouvrières, il est possible qu’un parti ouvrier se crée. Mais ceux qui sont conscients de sa nécessité ont intérêt à le préparer à l’avance pour l’aguerrir dans les multiples aspects, même limités, de la lutte des classes quotidienne.

    Et parce que le programme qui correspond aux intérêts des travailleurs est aussi l’héritage du passé et de toutes les luttes du mouvement ouvrier, alors il faut des militants qui assurent la continuité politique et s’attèlent dès aujourd'hui à la construction de ce parti.

    C’est le but que nous nous fixons.

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    Les élections européennes, comme toutes les élections, sont des événements mineurs par rapport à des mobilisations qui mettent la population en mouvement et qui font progresser sa conscience politique. Entre autres, la conscience que les choses ne changent pas par les urnes, mais par la lutte.

    Mais les élections constituent une occasion de défendre une politique qui correspond aux intérêts des travailleurs à court et à long terme. Elles offrent la possibilité ne serait-ce qu’à une fraction minoritaire des exploités d’affirmer par son vote son adhésion à l’idée que les classes exploitées ne pourront s’émanciper qu’en combattant l’ordre social existant avec l’objectif de le renverser.

    Alors cette campagne peut et doit nous servir pour avancer dans la construction d’un tel parti.

    Chaque campagne permet à tous ceux qui se retrouvent dans ces idées de se reconnaître entre eux et de se reconnaître dans un parti politique dans un programme : celui incarné par le slogan « contre le grand capital, le camp des travailleurs ».

    Profiter des européennes pour populariser des objectifs de lutte, les points de repères politiques dont manquent les travailleurs, en discuter, les mettre dans la conscience des travailleurs, c’est préparer les travailleurs au combat qu’ils devront menerjusqu’à leur émancipation totale. Parce que c’est en tant que classe sociale consciente de ses intérêts politiques que la classe ouvrière d’Europe saura briser ses chaînes, s’émanciper de l’exploitation et libérer par là même toute la société du capitalisme.

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    Alors, camarades et amis, notre campagne a commencé depuis plusieurs mois dans notre presse et nos bulletins d’entreprise, avec des réunions plus ou moins publiques, et lorsque la possibilité nous en est offerte, à l’occasion d’apparitions à la télévision.

    Mais, en réalité, une campagne n’est qu’une accentuation de ce que nous faisons en permanence : défendre et propager les idées communistes révolutionnaires.

    Eh bien, nous faisons appel à tous nos camarades, à tous ceux qui nous entourent, pour renforcer encore nos activités, discuter de nos idées, convaincre et associer à nous tous ceux qui estiment que la voix que nous voulons faire entendre, celle du camp des travailleurs, doit se manifester !

    Nous ne pouvons compter que sur l’engagement et le dévouement, non seulement de tous les militants, mais aussi de tous qui veulent s’opposer aux multiples voix qui se placent sur le terrain de la défense de l’ordre social actuel.

    Alors, camarades, bon courage !

    Et, au-delà des meetings dans les différentes villes de province, je vous donne rendez-vous le 10 mai, ici même, à la Mutualité, pour notre dernier meeting de campagne des européennes.

     

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