Intervention de Nathalie Arthaud au meeting des élections municipales à Paris07/03/20202020Brochure/static/common/img/contenu-min.jpg

Brochure

Intervention de Nathalie Arthaud au meeting des élections municipales à Paris

Au sommaire de la brochure

Sommaire

    La nécessité d’un parti ouvrier révolutionnaire

    Ce qui manque aujourd'hui à la classe ouvrière, c’est un parti révolutionnaire. De la gauche à l’extrême droite, la bourgeoisie dispose de plusieurs partis, tous dans le camp du grand patronat, les uns ouvertement, les autres de façon hypocrite.

    Quand le pouvoir les a trop usés, ils se passent le relai, mais ils mènent tous la même politique au service de la bourgeoisie. Et le Rassemblement national, le seul que l’on n’a pas vu à l’œuvre, a exactement les mêmes ambitions que les autres : gouverner en obéissant aux règles capitalistes et à la classe bourgeoise qui mène le jeu.

    Même s’ils le désiraient, la soumission de tous ces partis aux intérêts de la bourgeoisie les rend incapables de répondre aux besoins de la classe ouvrière.

    Un exemple, celui du logement.

    Ce n’est pas un problème nouveau. L’appel de l’abbé Pierre date de l’hiver 1954. La mobilisation autour des enfants de Don Quichotte, qui avaient installé des tentes le long du canal Saint-Martin, date de 2006. Depuis 2007, il y a même une loi qui consacre le droit au logement. C’était il y a treize ans !

    En treize ans, on a vu au pouvoir : la droite avec Sarkozy, la gauche avec Hollande, et maintenant Macron... Et nous en sommes au même point : des milliers de femmes et d’hommes sont toujours condamnés à dormir dans la rue. Des millions de familles sont rackettées par des marchands de sommeil, ou forcées de vivre dans des logements insalubres, ou tellement petits que la vie y est impossible. Et les prix ne cessent de monter avec la crise et la spéculation immobilière qu’elle engendre.

    Cette incapacité à loger dignement la population laborieuse dans un des pays les plus riches du monde fait partie des signes les plus révoltants de la barbarie de notre société. Parce que ce n’est absolument pas un problème technique. Quand les autorités y tiennent, elles savent faire bien plus compliqué. Elles peuvent par exemple construire un village olympique en quelques mois. En Chine, pays qui reste sous-développé à bien des égards, elles ont construit deux hôpitaux de fortune en quinze jours pour faire face au coronavirus !

    Là en treize ans, en soixante ans même, on n’a pas avancé, parce que tous ceux qui se hissent au pouvoir sont trop respectueux des intérêts des propriétaires, des promoteurs et des spéculateurs de l’immobilier ! Parce que, pour eux, la loi du marché et de la propriété privée est supérieure au droit d’avoir un toit sur sa tête !

    Eh bien, il faut un parti qui place le droit de se loger pour les travailleurs, pour les exploités et pour les plus pauvres au-dessus du droit de propriété et du marché.

    Il faut un parti qui place le droit de se nourrir correctement, de se chauffer, de se soigner, de s’éduquer au-dessus des lois du capitalisme.

    Un parti qui combatte le droit des riches, des possesseurs de capitaux de dominer l’économie, en contestant la propriété privée des usines, des banques, des grandes entreprises, des chaînes commerciales.

    Il revient aux travailleurs de construire ce parti, leur propre parti. Pas un parti de notables ou d’arrivistes qui voudraient vivre de la politique. Un parti d’ouvriers, d’employés, d’aides à domicile, d’agents de sécurité, d’infirmières… ui permette aux travailleurs de se rassembler et de défendre leurs intérêts là où ils travaillent, là où ils vivent. Un parti qui rassemble ceux qui refusent la condition d’exploité et veulent changer la société : un parti ouvrier révolutionnaire.

    Notre rattachement au courant communiste du mouvement ouvrier et à Marx

    Des partis ouvriers révolutionnaires ont existé dans le passé. Ce fut le cas des partis socialistes à la fin du 19ème siècle et au début du 20ème. C’est ce que représentait le Parti communiste dans les années 1920-1930, les quelques années qui ont suivi la révolution russe, et avant qu’il ne devienne stalinien.

    Depuis longtemps ces partis ont tourné le dos aux perspectives révolutionnaires. Eh bien, il faut reprendre le flambeau !

    Le capitalisme s’est développé avec la révolution industrielle à la fin du 18ème siècle en Grande-Bretagne. Pour étendre ses affaires, la bourgeoisie a transformé des millions de paysans en prolétaires forcés, pour gagner leur pain, de s’engager dans les tout nouveaux bagnes industriels. C’est elle, la bourgeoisie, la classe exploiteuse, qui a produit la classe ouvrière, la nouvelle classe d’exploités. L’une ne va pas sans l’autre. Et toute l’histoire du capitalisme est l’histoire de la lutte de classe entre la bourgeoisie et la classe ouvrière.

    Les premiers ouvriers ont d’abord brisé les machines là où elles provoquaient du chômage. Ils se sont organisés en créant des mutuelles d’entraide puis des syndicats. Ils ont découvert la force que leur donnaient les grèves pour obtenir des réductions du temps de travail ou pour leur salaire. Mais, en découvrant les idées communistes défendues par des militants comme Marx et Engels, ils ont réalisé que leur combat était indissociable du combat révolutionnaire pour changer toute la société.

    Ce ne sont pas Marx et Engels qui ont appris aux travailleurs ce qu’étaient l’exploitation et la division de la société en classes sociales. La lutte de classe était pour ainsi dire inscrite dans leur chair. Mais, grâce à Marx et Engels, ils ont découvert dans les idées socialistes leur force politique. Ils ont découvert leur capacité de transformer la société, et des générations de travailleurs en ont fait leur programme politique.

    L’histoire, disait Marx, est l’histoire des luttes de classes. La bourgeoisie, classe dominée sous l’Ancien Régime, s’était battue contre la noblesse pour développer ses affaires et faire naître des Etats bourgeois. Eh bien, c’était désormais le tour à la nouvelle classe exploitée, à la classe ouvrière, de se battre pour faire naître un Etat ouvrier lui permettant de construire une société supérieure au capitalisme, une société communiste, sans grand patronat, sans exploitation. Une société basée sur la propriété collective et une gestion démocratique, par en bas, de la vie économique et sociale.

    Marx et Engels n’ont pas défendu la perspective communiste par pur idéalisme, ils en ont découvert la nécessité. Ils ont démontré que le capitalisme creusait le fossé entre les riches et les pauvres ; que les crises économiques, déjà fréquentes à leur époque, n’étaient pas des accidents, mais qu’elles étaient inévitables dans une économie où les décisions de produire sont laissées au hasard du marché et de la loi du profit.

    Ils avaient aussi observé qu’en poussant à la concentration, avec des usines de plus en plus grandes et interdépendantes à l’échelle internationale, le capitalisme unifiait et rendait le fonctionnement de l’économie de plus en plus collectif, et donc préparait la société communiste.

    Marx combattait pour la révolution sociale, parce qu’il entrevoyait déjà comment le capitalisme menait à la ruine. Aujourd'hui, bien des choses ont changé, mais toutes les tendances que Marx et Engels anticipaient, à partir de ce qu’ils voyaient du capitalisme de leur époque, se sont confirmées, en pire !

    Le fossé entre riches et pauvres ? Aujourd'hui il dépasse l’entendement ! 1 %, les ultra-riches, possèdent deux fois plus que 90 % de la population sur la planète.

    Aujourd'hui aux Etats-Unis, dans le pays le plus riche de la planète, on a d’un côté un politicien comme Bloomberg, qui était prêt à débourser 1 milliard en publicité de campagne électorale, et de l’autre des femmes et des hommes diabétiques qui ne peuvent plus payer l’insuline dont ils ont besoin et qui mettent leur vie en danger !

    En France, dans le quartier de la Défense, des dizaines de milliards s’échangent tous les jours entre rois de la finance. Et le soir, sous la dalle, des centaines de SDF se cherchent un endroit pour dormir !

    Et que vaut la vie des centaines de milliers de femmes et d’hommes piégés à Idlib en Syrie dans des conditions dramatiques ?

    On multiplie les commémorations pour dénoncer la traite négrière. Mais est-ce que la vie des femmes et des hommes chassés de chez eux par les bombes ou la misère compte plus que celles des millions d’Africains enlevés de force et embarqués dans les cales de navires pour être vendus aux esclavagistes ?

    Et les milliers de migrants qui sont actuellement jetés contre les barbelés de l’Union européenne par Erdogan, pour faire du chantage à l’Union Européenne… C’est infect bien sûr de la part d’Erdogan. Mais l’attitude de l’UE, qui installe ses barbelés et tire sur ceux qui tentent les forcer, comme c’est le cas à la frontière grecque aujourd'hui, est 10 fois, 100 fois plus infecte !

    Quant aux crises, si elles sont différentes de celles observées par Marx, c’est par leur nouvelle puissance dévastatrice, parce qu’avec la financiarisation de l’économie elles sont plus généralisées et mondialisées.

    Regardez l’impact économique du coronavirus ! Les mesures de confinement et le ralentissement, voire la mise à l’arrêt d’usines en Chine, pèsent sur toute l’économie mondiale et particulièrement sur le tourisme, le textile, l’automobile, les transports et le luxe. Et c’est dans l’ordre des choses : quand les salariés ne peuvent plus aller au travail, la richesse ne se crée pas. En revanche, ce qui n’a rien de logique, c’est ce qui se passe sur les marchés financiers.

    Alors que le ralentissement économique mondial est évalué autour de 0,5, au maximum 1 %, toutes les Bourses, elles, ont dévissé de 10, 12 % du fait des anticipations des spéculateurs et des phénomènes de panique qui amplifient le phénomène et l’aggravent. Le responsable du Medef, Geoffroy Roux de Bézieux, estime que les officines économiques feraient mieux de ne plus publier leurs prévisions car elles seraient, je le cite, des prophéties auto-réalisatrices ! Oui, on marche sur la tête !

    Bien plus que les pertes réelles au niveau de la production, c’est ce jeu de casino qui effraie les économistes. Et ils sont bien mieux placés que nous pour savoir qu’avec les milliards qui alimentent la spéculation au quotidien, tout le système financier et bancaire s’apparente à un château de cartes qui peut s’effondrer au moindre souffle.

    Alors oui, un des plus petits organismes vivant sur cette terre, le coronavirus, déclenchera peut-être le prochain krach mondial. Mais le véritable danger ne vient pas de la nature, il vient de la finance et de la spéculation qui sont devenus, avec la crise, le moyen de gagner toujours plus, toujours plus vite.

    Quel que soit le bout par lequel on le regarde, le capitalisme est un système aberrant ! L’économie est une immense pompe aspirante des richesses à un pôle, où une toute petite minorité, quelque 2000 milliardaires dans le monde, contrôle des multinationales qui font travailler des centaines de milliers de personnes et approvisionnent le monde entier avec leurs usines géantes.

    Les bases de l’économie capitaliste sont de plus en plus collectives à l’échelle de la planète, mais le nombre d’individus qui trônent à son sommet est de plus en plus réduit.

    Autrement dit, depuis Marx, le capitalisme n’a surmonté aucune de ses contradictions, il n’a fait que pousser plus loin les conditions matérielles de sa propre disparition.

    Nous avons aujourd'hui mille fois plus les moyens qu’au 19ème siècle de recenser les besoins de toute l’humanité à l’échelle mondiale et de leur faire correspondre les moyens de production. Nous avons les moyens de répartir ce que l’on produit pour qu’il y en ait pour tout le monde. Mais nous en sommes incapables, parce que quelques milliers de personnes richissimes monopolisent les moyens de production et y font obstacle.

    Penser qu’un système aussi fou, aussi inégalitaire, injuste et anachronique peut durer éternellement est insensé ! Alors, la révolution sociale et le communisme sont peut-être des utopies, mais elles sont de celles qu’il faut réaliser et qu’il est possible de réaliser si la classe ouvrière s’en empare !

    Notre confiance dans la classe ouvrière

    Le capitalisme ne mourra pas de sa belle mort, il faudra le renverser. Et la force révolutionnaire capable de le faire est la classe ouvrière.

    Alors oui, le monde ouvrier est politiquement déboussolé. Et comment ne le serait-il pas, alors qu’il a été trahi par les partis dans lesquels il avait placé sa confiance ? Mais cela n’enlève rien à la force objective qu’il représente, à sa puissance numérique et sociale.

    Numériquement, le prolétariat ne fait que grandir à l’échelle de la planète. Dans tous les pays pauvres, le capitalisme continue de transformer les paysans en prolétaires. Chaque nouvelle usine créée en Chine, en Inde, au Bangladesh, au Brésil, chaque richesse minière ou agricole exploitée en Algérie, en Côte d’Ivoire, en Afrique du Sud… produit son nouveau contingent de prolétaires, du mineur à l’ouvrier agricole en passant par l’ouvrière textile, le camionneur et le docker.

    Et le prolétariat se développe aussi dans les pays riches. Ce n’est pas le sentiment et l’impression que nous en avons, car il n’est question que fermetures d’usines, de licenciements et de chômeurs. Mais d’abord, un chômeur est un travailleur, un travailleur privé d’emploi, mais un travailleur quand même ! Et ce n’est pas parce que les dirigeants préfèrent parler de classe moyenne, de collaborateurs et d’auto-entrepreneurs, que l’exploitation et la division de la société en classes ont disparu. Même la justice bourgeoise se sent obligée aujourd'hui de considérer les chauffeurs de taxi qui travaillent pour le compte d’Uber comme des salariés !

    Il y a toujours d’un côté ceux qui vivent du travail des autres, et de l’autre les travailleurs, qui ne peuvent vivre que de leur travail.

    Dans les pays riches, le camp des travailleurs s’est beaucoup diversifié. Et entre un ouvrier sur chaîne de fabrication, une auxiliaire de vie qui va de domicile en domicile, un magasinier chez Amazon, une aide-soignante à l’hôpital et, à l’autre bout, un ingénieur, cela fait des conditions de travail et de vie très différentes.

    Cette diversité est utilisée par la bourgeoisie comme autant de facteurs de division. Division entre ceux des ateliers et des bureaux, entre CDI et CDD, entre nationalités, entre femmes et hommes… Le grand patronat sait très bien créer et entretenir les divisions.

    Pendant la grève de décembre et janvier, le gouvernement, les députés de la majorité et leurs chiens de garde médiatiques n’ont pas cessé de dénigrer les cheminots et les agents de la RATP grévistes, qu’ils ont présentés comme des privilégiés, alors qu’ils gagnent en un mois de travail ce que nombre de grands bourgeois gagnent en une heure, sans rien faire d’utile pour la société !

    Cela n’a pas marché, parce que tous les salariés savent que, lorsqu’on se bat pour sa retraite, on se situe dans le camp des exploités, dans le camp de ceux qui n’ont que leur salaire pour vivre et qui veulent, une fois l’âge de la retraite arrivé, avoir une pension digne.

    Alors, loin de constituer un handicap, cette diversité fera la force des travailleurs lorsqu’ils se battront ensemble. C’est cette présence dans tous les rouages de l’économie et à l’échelle internationale qui leur donne la capacité collective non seulement d’exproprier la bourgeoisie, les propriétaires et les actionnaires des entreprises, mais de fonder les bases d’une organisation économique nouvelle, où la propriété des usines, des banques, des groupes de la distribution ne serait plus privée, mais collective.

    La guerre sociale entre la bourgeoisie et la classe ouvrière dure depuis le début du capitalisme. Cela fait plus de deux siècles. Cela a toujours été une lutte difficile, la lutte du pot de terre contre le pot de fer en quelque sorte.

    La bourgeoisie a en effet tout pour dominer. Elle a bien sûr son argent, des politiciens qui lui sont dévoués, mais elle a aussi et surtout un appareil d’État, avec des hauts fonctionnaires qui lui sont acquis et des forces de répression qui sont dressées pour défendre l’ordre social établi, aussi injuste soit-il.

    Malgré cela, la classe ouvrière s’est toujours battue. Y compris à certaines époques, ici en France ou aujourd'hui encore dans de nombreux pays, elle le fait sans le droit de se rassembler, de faire grève, sans syndicat et avec peu d’expérience de lutte. Au travers de ces combats, la classe ouvrière remporte des victoires, elle connaît aussi de grandes défaites, mais elle se relève toujours, parce qu’elle n’a pas d’autre choix que de se battre !

    Marx disait des travailleurs qu’ils n’ont rien à perdre que leurs chaînes ! C’est la raison pour laquelle ils seront aux avant-postes de la prochaine révolution.

    Oui, face à la faillite du capitalisme, le sort de l’humanité est entre les mains de la classe ouvrière, car non seulement elle est capable de renverser la bourgeoisie, mais elle peut prendre sa relève en prenant les commandes du pouvoir d’Etat et en décidant collectivement de l’orientation de l’économie.

    Politiquement, les travailleurs pourront s’organiser démocratiquement et faire en sorte de décider les choses par en bas, en s’appuyant sur les travailleurs eux-mêmes, sur leur dévouement, sur leurs syndicats revivifiés, sur leurs associations.

    Quant aux entreprises, elles ne tournent déjà que grâce aux salariés. Ils sont les cerveaux et les petites mains de toutes les entreprises, ils résolvent les problèmes qui se posent, et même ceux causés par les décisions saugrenues qui germent dans les têtes de ces managers qui ont une calculatrice à la place des neurones.

    La plupart des travailleurs ne sont pas bardés de diplômes en économie ou en finance, mais ils feront mieux que tous ces experts et ces PDG qui s’octroient des privilèges exorbitants, parce qu’ils ne seront pas aveuglés par le profit et la concurrence. Parce qu’ils chercheront à organiser l’économie rationnellement, en planifiant ce qui peut l’être, et en choisissant ce qui doit être produit en se basant sur les besoins de la population pour les satisfaire.

    En renversant et en expropriant la bourgeoisie, la classe ouvrière libèrera toute la société, y compris les autres catégories sociales comme les agriculteurs et les commerçants, qui vivent aujourd'hui sous la dépendance et le parasitisme du grand capital.

    Elle favorisera la lutte contre les mille et une oppressions qui se développent à partir des rapports d’exploitation, que ce soit l’oppression des femmes ou le racisme et la xénophobie.

    Elle aidera les pays soumis à l’impérialisme à s’émanciper. Et elle donnera une chance à l’humanité de sauver la planète car, sans se débarrasser du capitalisme, on ne peut pas y arriver !

    Le décalage entre les capacités objectives des travailleurs, leur rôle historique et leur état d’esprit : le rôle du parti

    Est-ce que le prolétariat prendra conscience de sa capacité à changer le monde ? Cela dépend en partie de nous et de notre capacité à avancer dans la construction d’un parti ouvrier révolutionnaire.

    La conscience révolutionnaire ne peut exister à l’échelle de la grande masse des travailleurs qu’aux moments exceptionnels où la révolte explose. En temps normal, les exploités se résignent à leur sort, convaincus qu’ils ne peuvent rien y changer.

    Les esclavagistes, aux Etats-Unis ou dans les Caraïbes, recouraient au fouet ou aux chaînes pour terroriser les esclaves. La bourgeoisie, elle, n’en a pas besoin, parce que le capitalisme a réussi à dissimuler la réalité de l’exploitation derrière la fiction de la liberté individuelle. Notre esclavage est entièrement consenti et on se croit libre parce qu’on a le choix de son maître !

    Oui, le salarié se croit libre parce qu’il a, parfois, la liberté de choisir le patron qui l’exploitera, mais il n’a pas le choix de ne pas se faire exploiter. il n’y est pas contraint par le fouet et les chaînes, il y est poussé par la nécessité et la faim !

    Eh bien, il y aura des périodes où les exploités n’accepteront plus. C’est pour ces périodes d’explosion sociale que nous voulons construire un parti révolutionnaire, car nous savons que c’est dans ces moments-là, lorsque des millions de femmes et d’hommes prennent confiance et envie d’agir, que leur conscience peut changer très vite.

    Nous l’avons touché du doigt à une petite échelle avec la grève des cheminots ou de conducteurs de métro et de bus. Même à cette échelle, où la mobilisation n’était ni explosive ni massive, ceux qui s’y sont engagés et ont été actifs en sont sortis transformés, surpris y compris par ce qu’ils ont été capables de faire.

    Il y a ceux qui n’imaginaient pas faire plus de 15 jours de grève, et qui ont finalement tenu 40, 45 jours, 50 jours. Ceux qui sont allés prendre la parole dans d’autres entreprises, ont multiplié les actions pour développer la grève et se sont découvert une âme de rebelle et de militant…

    Dans les moments de lutte intense, lorsque la classe ouvrière se soulève dans son ensemble, tout l’ordre social est bouleversé et les consciences le sont aussi. C’est là que ce qui paraît inimaginable devient possible. C’est là que les idées révolutionnaires que nous portons deviendront des armes pour que les travailleurs changent la société du tout ou tout.

    Alors il est important, même et surtout dans des périodes de recul comme aujourd'hui, de faire vivre ces idées dans la classe ouvrière. Il est important de gagner au parti ouvrier révolutionnaire de nouveaux militants, des femmes et des hommes qui, face à la crise de la société capitaliste, cherchent leur voie et ont envie d'agir.

    La campagne municipale et la construction du parti

    Nous sommes révolutionnaires. Nous pouvons, avec nos esprits jeunes et fondamentalement optimistes, refaire le monde et avoir la tête dans les étoiles.

    Mais nous gardons aussi les pieds sur terre, et nous savons que nous en sommes à gagner les travailleurs à la conscience de leurs intérêts et de leurs objectifs de classe. Et pour cela, nous nous engageons dans tous les combats politiques et sociaux qui se présentent à nous.

    Le prochain est celui des élections municipales.

    Nous avons tenu à être présents dans ces municipales, pour permettre aux travailleurs qui rejettent non seulement la politique de Macron, mais aussi tout l’ordre social bourgeois, de s’exprimer. Ce courant est minoritaire, mais il existe. Et nous le mesurons concrètement au fait que nos listes comptent plus de 10 000 candidats.

    Au-delà de leurs différences, tous ces candidats ont un point commun, celui de se sentir du camp des travailleurs. Eh bien, il faut que ce camp apparaisse politiquement. Au jour d’aujourd’hui, seul le courant communiste révolutionnaire exprime son programme et ses perspectives.

    Lutte ouvrière est présente, vous le savez, dans toutes les grandes élections, et bien sûr lors de la présidentielle. Mais, entre deux présidentielles, notre organisation disparaît des écrans radar que sont les médias. Et, pour tous ceux qui ne nous côtoient pas au jour le jour dans les entreprises ou dans les villes où nous militons, le courant communiste révolutionnaire que nous représentons semble avoir disparu.

    Grâce à cette campagne, ce courant s’affirme dans 240 villes. Il s’incarne au travers de femmes et d’hommes du monde du travail dont le point commun est de vivre les difficultés des classes populaires, de partager la même révolte contre le grand patronat et la même envie de changer les choses.

    Cela ne représente qu'une petite partie des villes plus ou moins importantes du pays, mais cette présence est nettement plus importante que lors des municipales précédentes. Dans cette période où beaucoup de travailleurs se détournent de la politique qui les dégoûte et où beaucoup d’autres se perdent dans un vote Le Pen, elle démontre que le camp des travailleurs est capable de recruter et de grossir. Ce n’est encore que sur des listes électorales et à une petite échelle, mais c’est un gage pour l'avenir.

    Et c’est pour nous tous un encouragement. Car cela n'aurait pas été possible sans le choix et l’engagement de plusieurs milliers de femmes et d'hommes des classes populaires.

    Oui, nous pouvons être fiers de l’existence de ces listes. Cela a exigé un gros effort collectif. Nous avons cherché autour de nous, dans notre famille, parmi nos amis, voisins, camarades de travail, et nous avons fait des cages d’escaliers pour trouver 30, 40, 50 candidats.

    Collectivement, nous faisons la démonstration que les travailleurs n’ont pas besoin de porte-parole, d’avocats et encore moins de chefs ou de directeurs pour se représenter eux-mêmes.

    Grâce à nos listes, la conscience de classe pourra s’incarner dans ce fait tout simple que, quand est ouvrier, on vote pour un parti ouvrier, pour une liste ouvrière qui met en avant les intérêts des travailleurs.

    Et, dans ces élections municipales qui se prêtent ô combien au carriérisme et au clientélisme, nous sommes fiers de porter les intérêts généraux des travailleurs, les intérêts moraux, politiques du plus grand nombre.

    En conclusion

    Maintenant, il nous reste huit jours de campagne. Eh bien, il faut continuer sur notre lancée. Il faut bien sûr faire connaître l’existence de nos listes, et par tous les moyens que vous trouverez bons : tractages, diffusion dans les boîtes aux lettres, messages sms, présence sur les marchés, devant les bureaux de poste… et surtout par la discussion.

    Et il faut convaincre ses voisins, sa famille, ses collègues de travail de voter pour faire entendre le camp des travailleurs. Ces discussions se traduiront pour certains par le geste bien concret de voter pour notre liste. Mais surtout toutes nos discussions, notre langage de classe, laisseront des traces dans les esprits. Tout cela contribue à l’affirmation d’un parti.

    L’issue du vote en termes d’élus, on la connaît. Nous n’aurons aucun maire et très peu d’élus parce que, indépendamment de nos efforts militants, nous sommes dans une période politique où les idées de la bourgeoisie, l’électoralisme et l’illusion du réformisme ont tellement pris le dessus que seule une minorité peut marquer sa sympathie pour la politique que nous défendons.

    Mais le problème n'est pas de se décourager face aux faibles scores électoraux. Il faut commencer à agir par un bout et c’est ce que nous avons fait.

    Pour nous, l’issue de cette campagne ne peut être que positive, car nous avons gagné de nouvelles recrues au camp des travailleurs.

    Alors il faut penser à la suite. Il faudra tout faire pour maintenir les liens qui se sont tissés dans cette campagne, car il faut que ce courant puisse exister dans la vie locale.

    Les injustices, la lutte de classe, ne s’arrêtent pas une fois que l’on a quitté l’entreprise. Elle se poursuit au-dehors, entre propriétaires et locataires, entre banquiers et clients, entre multinationales de l’eau, du gaz, de l’électricité et usagers… Et, bien sûr, entre le monde ouvrier, et le gouvernement et l’État bourgeois.

    Nous sommes témoins au quotidien de mille et une injustices : les expulsions locatives et même les expulsions de sans-papiers ; les fermetures de bureaux de poste et les fermetures de classes ; les déserts médicaux ; l’acharnement administratif contre les plus pauvres ; le harcèlement de la police et les contrôles au faciès… jusqu’aux pannes d’ascenseurs, qui durent des semaines et rendent la vie infernale à beaucoup d’entre nous.

    Le courant que nous représentons est trop faible pour intervenir dans tous ces combats mais, plus son implantation grandit, plus il peut y prendre part et aider les travailleurs à s’organiser pour les mener.

    Jean-Pierre a expliqué que les luttes sur les salaires et les conditions de travail dans les entreprises servaient d’école élémentaire pour les travailleurs qui voulaient changer toute la société. Eh bien, il en va de même des mobilisations que l’on peut impulser à l’échelle de son immeuble, de sa cité ou de sa ville. Oui, cela fait aussi partie des tâches de tous ceux qui veulent construire un parti ouvrier révolutionnaire.

    Voilà pourquoi les liens, les réseaux nouveaux que nous avons crés dans cette campagne doivent être maintenus. Ils participent de la construction du parti nécessaire à la classe ouvrière.

    Nous ne savons pas et ne pouvons pas savoir quand viendront les tempêtes révolutionnaires et quand le virus révolutionnaire sera celui qui donnera des sueurs froides à la bourgeoisie et à son Etat. Mais nous sommes sûrs qu’elles viendront, car tout devient de plus en plus insupportable.

    Jean-Pierre a parlé de l’exploitation dans les entreprises., Mais regardons autour de nous : les guerres, les camps, les barbelés, les tueries et les pogroms perpétrés par des fanatiques de tous bords, de l’Inde à l’Amérique en passant par le Moyen-Orient, l’Afrique et l’Europe.

    La société craque de toute part, car nous ne sommes pas seulement confrontés à la crise du capitalisme, mais à la crise de toute une organisation sociale qui pourrit par tous les bouts. Et même le dérèglement climatique est à mettre sur le compte de cette organisation économique aveuglée par ses affaires, sa rentabilité, ses cours boursiers !

    La seule question qui se pose est de savoir si l’on accepte de laisser sombrer la société avec le capitalisme, ou si l’on se bat pour lui donner un avenir.

    Eh bien, nous sommes le nombre que nous sommes, mais nous avons fait le choix de nous battre.

    Faute de mouvements sociaux de masse qui pourraient accélérer le cours de l’histoire, nous en sommes réduits depuis des décennies à faire de la propagande.

    Nous en sommes encore au stade de semer des graines. Nous en sommes encore tout simplement à propager la conscience de classe. Mais ce sont des graines, précieuses, parce que ce sont les seules qui peuvent faire pousser une autre société, une société vraiment humaine, parce que débarrassée de l’exploitation de l’homme par l’homme !

    Alors vive le communisme, vive le parti ouvrier révolutionnaire !

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