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Allocution de Nathalie Arthaud au meeting de Nantes

Au sommaire de la brochure

Sommaire

    Travailleuses, travailleurs, chers amis, chers camarades,

    Les massacres qui ont ensanglanté Paris vendredi dernier ont profondément modifié la situation politique et sociale. Oui d’une certaine façon, il y aura un avant et un après le 13 novembre.   

    Au mois de janvier, avec les attentats contre Charlie Hebdo et le magasin Hypercasher nous avons déjà été confrontés à ce genre de situation. Mais cette fois, il y un cran de plus dans l’horreur. Il y a la certitude que les terroristes ne s’arrêteront pas, qu’ils frapperont indistinctement, sans raison, simplement pour terroriser.

    Nous, qui dénonçons depuis toujours les interventions impérialistes, le chaos et les guerres qu’elles ont engendrés dans cette région du Moyen-Orient, nous qui avons été révoltés par les derniers attentats perpétrés en Turquie, au Liban, en Egypte, nous, qui nous sentons profondément solidaires des migrants qui fuient les bombes, nous savons bien que la guerre n’a pas démarré il y a huit jours.

    Mais tous les grands partis instrumentalisent l’émotion collective et la manipulent pour faire croire que vendredi dernier, « nous sommes entrés en guerre ».

    Les appels à l’unité nationale, les cérémonies solennelles, la réunion du Congrès à Versailles, les entrevues de Hollande avec Sarkozy et Le Pen, l’établissement de l’Etat d’urgence, la révision de la constitution, tout est fait pour créer un climat exceptionnel et nous enfoncer dans le crâne que nous sommes entrés en guerre.  

    Oh, les rivalités politiciennes continuent. On a vu cette comédie indécente à l’Assemblée nationale où la droite et le FN ont conspué les ministres. Tous cherchent à tirer leur épingle de l’émotion et de la peur engendrée par ces attentats. Mais si la droite et le FN tiennent à se démarquer de l’appel à l’union nationale de Hollande, ils sont tous profondément d’accord. Ils sont tous va-t-en guerre, ils sont tous pour augmenter les mesures sécuritaires.

    Regardez les dernières mesures annoncées par Hollande, elles sont toutes puisées dans le programme de la droite et du FN. PS, droite et FN, ils font tous pression sur la population pour qu’elle accepte la guerre, ils sont tous pour fermer les frontières, pour multiplier les contrôles, pour donner plus de pouvoirs à la police. Cela s’appelle bien l’union sacrée, l’union sacrée entre le gouvernement socialiste, la droite et l’extrême droite.  

    Et gare à ceux qui oseraient critiquer cette guerre ! Gare à ceux qui oseraient critiquer l’état d’urgence et les mesures exceptionnelles ! Ils seront accusés d’excuser les terroristes et d’être des fascistes comme nous l’avons été dans les colonnes de Ouest France ou sur France Inter cette semaine. On peut demander des inflexions, critiquer telle ou telle modalité, mais souligner les responsabilités des dirigeants français dans la situation et ne pas marcher dans la mobilisation générale, ça, c’est, pour la caste politique et médiatique de la trahison, c’est passer dans le camp de l’ennemi.

    L’« unité nationale » consiste à faire taire toute véritable opposition. Les terroristes la font taire à coups de kalachnikovs, les dirigeants des pays riches l’étouffent en instrumentalisant l’émotion et les peurs.   

    L’appel à l’unité nationale est une manipulation grossière. Au nom de l’émotion, parce qu’il y a cette horreur terroriste, ils veulent que nous acceptions leur politique passé, présente et à venir. Ils veulent nous faire oublier leurs responsabilités dans le recul de la condition ouvrière, ils veulent nous faire oublier leurs responsabilités dans le chaos qui règne aujourd’hui au Moyen Orient.

    Eh bien il faut continuer de dire que ces gens-là ne représentent pas les intérêts des travailleurs, ni en politique intérieure ni en politique extérieure. Les travailleurs ne doivent pas marcher dans l’union sacrée PS Droite FN.

    Hollande était très fier d’avoir immédiatement riposté en bombardant, Daech en Syrie. Personne ne peut croire que ces bombardements permettent de nous protéger ici d’éventuels attentats. C’était des bombardements pour se venger, pas pour nous protéger. Et on nous dit que ces bombes ont visé des centres d’entraînement de Daech, mais elles sont tombées sur des villes peuplées, sur des populations civiles, sur les pauvres qui justement sont les seuls à ne pas avoir pu fuir. Qui peut croire qu’elles n’ont pas, elles-aussi, fait des dizaines de victimes innocentes ?

    C’est une première raison de s’opposer aujourd’hui et maintenant à ces bombardements. L’autre c’est que ces interventions impérialistes ne font que nourrir le terrorisme.

    Cela fait 14 ans que les grandes puissances ont déclenché la guerre contre le terrorisme après l’attentat du World Trade Center. A l’époque il y avait un ou deux foyers terroristes. Aujourd’hui, plus tard, il y en a des dizaines.

    Car ces monstres ne sortent pas de rien. Ils sont les fruits pourris de la politique des grandes puissances. Pour maintenir leur domination dans cette région du Moyen-Orient qu’ils avaient colonisée, les pays impérialistes n’ont jamais hésité à s’appuyer sur les pires régimes, sur des dictatures moyenâgeuses comme l’Arabie saoudite, sur l’État d’Israël qui  opprime le peuple palestinien.

    Et lorsque cela les arrangeait, ils ont armé des groupes et manœuvré pour faire naître des oppositions. En Irak, les Etats-Unis ont renversé Saddam Hussein, détruit son armée et exclu les Sunnites du régime qu’ils ont mis en place. Ce sont eux que l’on retrouve aujourd’hui à la tête de Daech.

    Tout le monde sait qu’aujourd’hui même les « alliés » de la France que sont le Qatar, l’Arabie saoudite continuent de financer, armer et former certains de ces groupes. Tout le monde sait que Daech prospère sur le trafic de pétrole et que leurs prétendus alliés de la région, la Turquie en sont les complices. Est-ce que les dirigeants français leur demandent des comptes ? Non.

    Tout le monde s’étonne que 30 000 djihadistes parviennent à faire leur loi sur un territoire aussi vaste et qu’ils résistent aux attaques d’une coalition internationale. Mais c’est justement le résultat des politiques tordues de toutes les grandes puissances qui jouent chacune leur propre jeu, qui ont des intérêts multiples dans la région et qui s’appuient un jour sur les uns, un jour sur les autres. 

    Et cette politique, elle continue aujourd’hui. Le gouvernement veut avoir les mains libres pour bombarder en Irak et en Syrie. Il veut avoir les mains libres pour s’acoquiner sans qu’il n’ait aucune opposition, avec les régimes les plus sanguinaires, comme le  régime de Bachar Al Assad pour battre Daech. Car faut-il rappeler que sur ces quatre dernières années, le régime de Damas a fait 250 000 morts, qu’il a attaqué son peuple à l’arme chimique, qu’il a fait disparaître des dizaines de milliers d’opposants ?

    Peut-on lutter contre des monstres en s’appuyant sur des régimes tout aussi monstrueux ? En agissant ainsi, ce n’est pas à la victoire contre le terrorisme qu’ils nous mènent, mais à une société de plus en plus barbare. Encore une fois, ils sont en train de poser des bombes à retardement dans une région qui est explose déjà de toutes parts.

    Daech exerce une des dictatures les plus féroces qui soient dans les régions qu’ils dominent en Irak et en Syrie. Leurs victimes sont autant et même plus musulmanes que chrétiennes, preuve s’il en fallait qu’il ne s’agit ni d’un « choc des civilisations » ni « d’une guerre de religions » mais d’une lutte pour le pouvoir et pour les richesses d’une région riche en pétrole.

    A la veille de la première guerre mondiale, Jean Jaurès disait : « le capitalisme porte en lui la guerre comme la nuée porte l’orage ». On peut dire aujourd’hui que « le capitalisme porte en lui le terrorisme comme la nuée porte l’orage ». On ne peut pas combattre l’un sans combattre l’autre.  

    Le danger ne vient pas de l’extérieur, d’Afrique ou du Moyen-Orient. Il ne vient pas de telle ou telle religion, de telle ou telle communauté. Il vient de l’intérieur de ce système économique qui engendre chômage, inégalité, injustices, délinquance, guerres.

    Un monde où 67 familles possèdent l’équivalent de ce qu’ont, pour survivre, 3,5 milliards d’être humains ; un monde où l’Afrique et le Moyen-Orient sont des eldorados pour les capitalistes mais des enfers pour leurs populations ne peut qu’engendrer des monstruosités. Le capitalisme est en faillite, au bout du rouleau. Et on le voit, le règne de la bourgeoisie, c'est non seulement l’exploitation et la dictature des actionnaires sur la société mais c'est aussi cette barbarie qui se répand partout dans le monde et qui atteint maintenant Paris et le cœur de l'Europe.

    On ne se débarrassera de cette barbarie qu’en prenant le mal à la racine, c’est-à-dire à la domination de ce système économique fou. Alors pour un monde débarrassé de l’obscurantisme, de l’injustice, poursuivons notre combat pour renverser le capitalisme et bâtir une société communiste, la seule issue pour l’humanité.  

    Certains nous disent d’accord avec tout ça, mais « on ne peut pas rester sans rien faire ». « Il faut bien les arrêter ». « Il faut agir là, tout de suite, concrètement et pour ça vous n’apportez pas de solution ».

    Mais est-ce que le gouvernement en amène ? Je l’ai dit la guerre n’en amène pas, elle nous enfonce dans l’engrenage sanglant. Et en matière de sécurité intérieure, c’est la même chose. Qui peut croire que l’état d’urgence, qu’une énième loi anti terroriste nous protégera des attentats ?

    Hollande a aligné les mesures sécuritaires : déchéance de la nationalité, expulsions, contrôles multipliés…Appliquez-les une à une à la situation de vendredi, aucune n’aurait empêché d’agir les terroristes. Est-ce que l’on fera peur aux terroristes en les menaçant d’être déchus de leur nationalité et en les menaçant d’être expulsés ? Evidemment pas.

    Comme le commande le FN et la droite, le gouvernement veut plus de contrôle aux frontières. Mais aucune frontière n’a jamais été étanche ! Et c’est surtout dérisoire quand on sait que tous ces terroristes sont français, ils sont nés ici, ils sont recrutés ici. Et quand bien même ils seraient un peu plus entravés dans leurs mouvements, quand bien même demain, il leur serait plus difficile de se rendre en Syrie, qu’est-ce que cela changerait puisqu’ils sont là. 

    Vis-à-vis des terroristes, ces mesures sécuritaires s’apparentent à des gesticulations. Mais elles seront de vrais moyens pour faire taire les voix dissidentes. Au nom de l’état d’urgence le gouvernement a annulé des manifestations, des meetings. Il a interdit la manifestation prévue demain en faveur des migrants. Pour l’instant il ne contrôle pas la presse et les journaux, remarquez qu’il n’en a pas besoin puisque les grands médias se mettent spontanément aux ordres, mais l’état d’urgence lui en donne la possibilité.

    Et au-delà des pouvoirs accrus pour l’Etat et la police qui risquent de se retourner contre nous, il y a les signaux que toute cette politique sécuritaire envoie à la population et qui vont conforter le cours réactionnaire.

    Toutes ces mesures qui pointent du doigt les étrangers, les immigrés, toutes ces mesures qui prônent la multiplication des contrôles, un renforcement des frontières ne peuvent qu’encourager la méfiance, la suspicion, le repli sur soi, l’intolérance. Elles vont au bout du compte dans le sens de ce que recherchent les terroristes eux-mêmes et surtout elles confortent tous les racistes, elles jettent ceux qui ont peur dans les bras des plus nationalistes.

    Le gouvernement espère tirer profit de son nouveau cours sécuritaire. Mais c’est le FN qui en tirera le plus de profits.

    Ces mesures ne seront pas seulement inefficaces, elles vont aggraver le climat nauséabond qui préexistait aux attentats où déjà il y avait de petits groupes qui attaquaient les migrants, où les identitaires d’extrême droite s’agitaient y compris contre l’extrême gauche. Demain, les mêmes s’en prendront peut-être à nos camarades de travail, aux membres de nos familles, à nos amis parce qu’ils sont étrangers ou suspectés de l’être par leur nom, leur couleur de peau ou leurs signes religieux.

    Eh bien, il va falloir s’opposer à tout ce poison. Va-t-on laisser le FN et ses clones de la droite et du PS nous enfoncer dans ce climat guerrier et dans cette méfiance généralisée ? Va-t-on les laisser dire qu’il faut rejeter les migrants au prétexte que des terroristes peuvent s’infiltrer dans leurs rangs ? Il ne le faut pas.

    Ces idées prennent d’autant plus facilement qu’en face, il n’y a pas assez de monde pour s’y opposer. Et ce n’est pas en faisant des leçons de morales républicaines que nous les combattrons. C’est en nous adressant aux travailleurs au nom de leurs intérêts.

    Il est vital que nous, les travailleurs, quelle que soit notre origine, nous nous sentions une classe unie par nos intérêts pour nous défendre contre cette minorité qui nous exploite et plonge le monde dans la barbarie. Il est vital que nous retrouvions une conscience de classe, une conscience de nos intérêts communs par-delà la diversité de nos métiers, de nos origines, de nos statuts.

    On nous rabâche que notre identité dépend de notre origine, de notre nationalité ou de notre confession. Mais un aspect essentiel de notre vie et de notre identité, c'est que nous sommes des travailleurs, des ouvriers, des employés, gardiens, aides-soignantes ou caissières. Notre condition de travailleur exploité nous unit, au-delà de nos différences.

    Alors, il faut serrer les rangs, rejeter ceux qui veulent dresser un mur entre nous et affirmer notre conscience d'appartenir à une seule et même communauté, la communauté des travailleurs et des exploités. Une classe sociale qui n’a rien de commun avec ceux qui nous appellent aujourd’hui à l’union nationale contre le terrorisme, car ce sont ces mêmes dirigeants qui nous portent les coups, ici en France, en détruisant les droits des travailleurs, en permettant aux patrons de licencier sans entrave et sans pénalité, en laissant le chômage battre record sur record.

    Ils en appellent à l’unité nationale, mais quand les travailleurs essayent de se battre comme à Air France, ils les traitent de voyous. Alors à cette fausse unité nationale opposons l’unité des travailleurs et des opprimés. L’unité d’une classe sociale, le camp des travailleurs qui ne pourra s'émanciper de l'oppression qu'en en détruisant ses racines, l'organisation capitaliste de l'économie.

    Avant le 13 novembre, on nous expliquait à gauche, que l’essentiel était de lutter contre le Front national. Rappelez-vous, comment Valls expliquait que la France risquait, avec le FN de se fracasser. Que l’éventuelle élection du FN à la tête d’une région serait un « drame » et une « catastrophe » pour la France. Comment il en appelait au-dessus des partis, à faire le front républicain !

    Mais il y a quelques jours, Hollande appellait Marine Le Pen à l’Elysée pour prendre auprès d’elle des conseils. Et le gouvernement a emprunté au programme du FN nombre des mesures d’urgence qu’il présente aujourd’hui.

    Oui, c’est bien l’union sacrée avec le FN. Et demain, ils demanderont de faire barrage au FN dans les urnes ? Ils en appelleront au Front républicain ? Ils diront « tout sauf Le Pen » ? Tout cela c’est de la manipulation politicienne.

    La même manipulation politique que l'on a subie en 2012 avec le « tout sauf Sarkozy ». Tout cela pour nous faire croire qu’il y a gouffre séparant tous ces partis. Tout cela pour faire peur aux travailleurs, quand c’est le PS lui-même qui est en train de porter les coups ! Tout cela pour nous faire oublier que c’est lui, le PS qui a fabriqué le FN en abandonnant son propre électorat !

    Le PS, la droite et le FN sont rivaux, ils se battent pour aller à la mangeoire mais ils sont surtout les défenseurs et les complices de cet ordre social capitaliste. Ils défendent tous le point de vue du patronat. Ils ont la même arrogance, le même mépris de classe. Ils se concurrencent mais ils s’accordent pour jouer cette comédie électorale qui cache ceux qui dominent réellement la société, la grande bourgeoisie et le grand capital. 

    L’influence du FN dans la classe ouvrière vient des peurs, du repli sur soi, du désarroi politique engendré par la trahison et les reniements de partis qui prétendaient représenter leurs intérêts. Tout cela est fondamentalement lié au fait que les travailleurs ne se battent plus comme il faudrait sur leur terrain de classe pour se défendre des attaques de la bourgeoisie, mais cela provient aussi du fait qu’ils ont cessé de se battre pour diffuser leurs valeurs au sein même de la classe ouvrière.  

    Les bourgeois nous ressassent en permanence leurs valeurs républicaines, Liberté, égalité, fraternité, contre toute réalité. Eux-mêmes n’y croient pas un instant. En face, le camp des travailleurs se tait, les travailleurs, y compris les plus conscients ne mettent plus en avant les valeurs que leur classe représente.

    Car oui le camp des travailleurs, la fraction des travailleurs consciente a toujours porté des valeurs propres aux exploités. Alors que la bourgeoisie a toujours prôné l’individualisme, la concurrence et le chacun pour soi, les travailleurs ont compris qu’ils avaient besoin de solidarité, d’organisation et de dévouement non seulement pour se battre contre l’exploitation, mais tout simplement pour survivre.

    En se développant, le mouvement ouvrier a créé ses propres valeurs, contre celles des Rois, contre les Eglises qui ont toujours protégé les puissants et contre la bourgeoisie et son sacro-saint règne de l’argent. Tout en menant le combat quotidien, contre le travail des enfants, pour la journée de travail de 8 heures, les militants défendaient  l'idée de l'émancipation sociale, du progrès de toute la société, d’un monde libéré des superstitions et des préjugés.

    L’internationalisme a toujours fait partie du capital du mouvement ouvrier. C’est en intégrant dans leurs rangs tous les travailleurs, d’où qu’ils viennent, quelle que soient leur langue, leur religion, leur couleur de peau que les travailleurs ont gagné leurs meilleurs combats. Ce faisant, ils ont fait reculer les idées racistes et xénophobes dans toute la société. Et l’honneur du mouvement ouvrier a été de militer contre toutes les formes d’oppression, pour l’émancipation des femmes, contre l’esclavage, pour la libération des peuples colonisés, contre l’apartheid.  

    Ce capital a été peu à peu dilapidé par le PCF, qui en devenant stalinien, est aussi devenu nationaliste. Après avoir remplacé le drapeau rouge par le drapeau bleu blanc rouge et l’Internationale par la Marseillaise, PCF a versé dans le chauvinisme et les attaques anti-allemandes pendant la seconde guerre mondiale.

    Ensuite les militants et le milieu ouvrier qu’il influençait ont été nourris aux diatribes de Marchais contre une Europe accusée de piétiner la souveraineté de la France ou aux appels pour le « produire français ». Et avec son obsession anti-allemande et  sa propagande cocardière, un Mélenchon en remet une louche. Mais aujourd’hui c’est Marine Le Pen qui prospère sur ce terreau.

    Alors, sans attendre des luttes qui feront de nos idées une force capable d’ébranler la société bourgeoise, il faut se battre à nouveau pour diffuser les idées internationalistes et les valeurs propres au mouvement ouvrier parmi les travailleurs. Les idées de la lutte de classe qui constituent la seule boussole pour indiquer les intérêts des travailleurs.

    Loin des calculs électoraux, il faut montrer aux nôtres, y compris à ceux qui s’égarent en regardant vers le FN, qu'il y a encore dans la classe ouvrière des femmes et des hommes qui connaissent la seule voie pour lutter contre les injustices et les inégalités de cette société : lutter contre la bourgeoisie, faire reculer l’exploitation pour finir par la supprimer totalement. Il n’y aura pas d’autre raccourci pour combattre le FN.

    Faire entendre le camp des travailleurs, c’est porter les revendications immédiates qui permettraient au monde ouvrier de relever la tête. Mais c’est aussi œuvrer pour que renaisse un pôle de résistance au cours réactionnaire pris par la société.

    On en mesure l’importance avec ces attentats, avec la montée du FN, avec cette pression à l’unité nationale et au nationalisme. On en mesure l’importance avec le cours de plus en plus inhumain pris par la société, dont le sort des migrants est bien significatif.

    C’est passé au second plan de l’actualité, mais chaque semaine des dizaines d’enfants, de femmes et d’hommes meurent pour essayer de traverser la Méditerranée. Les survivants qui ont réussi à poser un pied en Europe, se heurtent encore aux murs et aux barbelés qui hérissent désormais l’Europe. Ils sont arrêtés, bloqués, forcés d’attendre dans des conditions infâmes quand ils ne sont pas internés dans des camps de rétention. Relâchés, ils reprennent leur marche forcée ou s’en remettent aux passeurs, risquant de mourir asphyxiés ou d’être parqués dans des bidonvilles comme celui de Calais.

    En leur assurant la liberté de circulation et d’installation, les réfugiés se répartiraient d’eux-mêmes à l’échelle de l’Europe, ils pourraient s’appuyer sur des membres de leurs familles et sur toutes les bonnes volontés qui existent. Mais non ! Pour ne pas donner prise aux critiques de la droite et de l’extrême droite, le gouvernement socialiste barricade les frontières et aggrave les souffrances de centaines de milliers d’enfants, de femmes et d’hommes. 

    Tout est ignoble dans cette politique. Ce tri, qui est fait entre les « vrais réfugiés », qu’on pourrait accepter et les migrants économiques, qu’il faudrait refuser. Ces centre appelés Hotspot, qui sont une façon de sous-traiter les migrants aux pays pauvres, à la Grèce, au Liban à la Jordanie ou à la Turquie. Comme si pour ces pays, ce n’était pas un problème autrement plus compliqué à résoudre que pour des pays riches comme l’Allemagne ou la France ! Les grandes puissances payent pour que ces centres soient le plus loin de chez eux. Exactement comme les municipalités bourgeoises payent pour ne pas construire de logements sociaux sur leur territoire.

    Il n’y a pas besoin d’être révolutionnaire pour dire que la France peut faire mieux qu’accueillir  les 30 000 réfugiés sur trois ans promis par le gouvernement. Cela fait moins de réfugiés qu’il n’existe de commune ! Tout le monde l’a rappelé, à d’autres époques, où la situation économique du pays n’était pas plus florissante, la France a su accueillir les réfugiés de la guerre d’Espagne, les boat people vietnamiens ou encore le million de pieds noirs qui est venu en France en catastrophe à la fin de la guerre d’Algérie.

    Hier le gouvernement, comme la droite et l’extrême droite nous répétaient jusqu’à la nausée qu’on ne peut pas accueillir toute la misère du monde. Aujourd’hui ils vont nous dire qu’accueillir les migrants représente un danger parce que des terroristes pourraient se glisser parmi eux. Ils vont maintenant faire passer des victimes de la barbarie pour des assassins potentiels !

    Ça aussi c’est une monstruosité. S’ils voulaient accueillir les migrants et vérifier leur identité, mais qu’ils organisent leur asile, qu’ils organisent des ponts aériens, qu’ils en finissent avec ces naufrages et ce sauve qui peut ! Les boat people ne sont pas arrivés en France à la nage. Leur transport à l’époque avait été organisé. Alors qu’on ne nous raconte pas n’importe quoi pour refuser ici l’asile aux migrants.  

    Encore une fois, face à cette unanimité réactionnaire, il faut montrer qu’il y a des femmes et des hommes qui ne cèdent pas à  au repli sur soi, à la peur de l’autre. Qu’il y a des femmes et des hommes qui ne se trompent pas sur les responsables de la situation et qui se préparent à lutter contre la domination de la grande bourgeoisie et contre tout son système qui nous mène à la barbarie.

    Tous ces évènements, toutes ces idées réactionnaires fleurissent sur le terreau d'un capitalisme qui dégénère. Crise économique, crise politique, crise écologique, crise migratoire, les dirigeants les plus puissants de la planète ne maîtrisent plus rien.

    Cela saute aux yeux en matière internationale, j’en ai déjà parlé. Et regardez comment, même sur la question de l’écologie et du réchauffement climatique, ils sont incapables de trouver de véritables solutions. Dans le cadre de la COP 21, ils vont tous s’engager solennellement pour agir. Mais ils ne prendront aucun engagement contraignant ni pour leur pays, ni pour les grands groupes industriels qui sont les premiers pollueurs de la planète. Des trusts pour qui l’écologie, c’est bon pour se faire de la publicité et pour s’asseoir dessus comme le montre la fraude à grande échelle de Volkswagen.

    Les dirigeants de la planète, les dirigeants des grands groupes capitalistes savent tout du problème et des conséquences catastrophiques pour des millions de femmes et d’hommes mais ils ne bougeront le petit doigt que si cela peut rapporter de l'argent aux capitalistes que s’ils trouvent le moyen de faire du business avec l’écologie. Eh bien il est urgent de renverser ce système complètement fou !

    Si nous faisons le choix de défendre une politique  qui se place exclusivement sur le terrain de la classe ouvrière, c’est qu’elle est la seule classe qui peut s’attaquer à la racine même des problèmes, à l’organisation capitaliste de la société.

    Mais pour en être capable, elle doit non seulement retrouver le chemin de la combativité mais aussi de la conscience de classe. Faire en sorte que cette conscience de classe redevienne la boussole des travailleurs est le fond de notre politique. C’est notre raison d’être.

    Eddy a parlé des évènements d’Air France. Ils ont confirmé le caractère anti-ouvrier de tous les grands partis, du PS au FN, mais ils ont aussi réveillé la conscience de classe dans le monde du travail. Sans que cela n’ait été coordonné par aucun syndicat, par aucun parti politique, l’écrasante majorité des travailleurs s’est unie derrière les salariés d’Air France et contre le torrent de boue dont ils ont été victimes. Cela a été une réaction élémentaire, un même sentiment d’indignation, d’injustice et de dignité bafouée ; cela a été une réaction de classe, l’expression d’un sentiment de classe.

    Mais entre un sentiment de classe et une conscience de classe solide, forte, capable de résister aux pressions de la société bourgeoise et d’orienter les travailleurs dans les combats qu’ils ont à mener, il y a un gouffre. C’est ce gouffre que pourrait remplir un parti ouvrier présent largement dans les classes populaires en incarnant dans toutes les situations politiques une politique propre aux travailleurs. C’est ce que nous visons.

    Et c’est tout le sens de notre participation aux élections en général. Que les travailleurs s’affirment, de nouveau, comme une force politique, alors qu’ils sont aujourd’hui dispersés, déboussolés pour certains ne se fera pas en une élection. Ce processus peut prendre d’autres voies que celle des élections. Une révolte des travailleurs pourrait faire mûrir les consciences à une toute autre échelle et d’une toute autre façon. Mais il faut utiliser toutes les possibilités qui se présentent à nous pour progresser dans cette voie. Et là, dans 15 jours, il faut utiliser les élections régionales.

    Il faut que le sentiment et les intérêts de classe qu’il recouvre et que l’on a vu lors des évènements d’Air France, trouve une expression politique. Si les travailleurs ne s’érigent pas en force politique, c’est la bourgeoisie et les partis à son service qui garderont le monopole de la parole. Et leurs mensonges sur le « coût du travail », sur la compétitivité, sur les 35 heures ou sur le code du travail auront libre court. Eh bien il faut que les travailleurs ne laissent pas leurs ennemis politiques parler à leur place.

    Chaque élection doit permettre de montrer qu’il y a des femmes et des hommes qui se revendiquent du camp des travailleurs. Alors, profitons de ces élections régionales et de la présence des listes LO pour faire entendre le camp des travailleurs.

    Dans tout ce contexte, notre participation aux élections peut paraître dérisoire. Beaucoup, avant même les attentats se désintéressaient de cette élection. Cela fait des années, des décennies que le monde du travail vit et s’enfonce dans cette précarité et i y en a eu des élections, il y en a eues des alternances. Alors oui les travailleurs en ont eu des occasions de vérifier que les élections ne changeaient pas leur sort.

    Aujourd’hui avec les attentats et ce sentiment d’être démuni face à une société qui s’enfonce toujours plus dans la barbarie, ne peut que renforcer l’aspect anecdotique d’un tel scrutin et cette idée, que « tout ça ne sert à rien ».

    Mais s’il n’y a pas à s’en étonner, il y a à convaincre. Il y a à convaincre que si, le vote pour les listes Lutte ouvrière a une utilité : celle de montrer qu’il y a des travailleurs qui ont compris, comme eux, que les grands partis ne représentent pas leur camp. Celle de rassembler politiquement les travailleurs conscients d’avoir des intérêts de classe à défendre.

    Oh, le problème n’est pas d’être entendu de ceux qui gouvernent, car ces gens-là se moquent de ce que les électeurs peuvent signifier dans les élections. Mais il s’agit d’être entendu du monde du travail, il s’agit de montrer aux nôtres qu’une fraction  ne se résigne pas, qu’il y a un camp auquel ils peuvent se rallier s’ils n’acceptent pas la situation.

    En déchirant ou en brûlant leur carte d’électeurs, en affirmant qu’ils ne marchent plus dans tout ce cirque, certains croient pouvoir se venger des partis qui les ont trahis et exprimer leur opposition radicale au système. Ils se trompent car en s’abstenant, ils se taisent. Et pire, elle donnera d’autant plus de poids à tous qui voteront pour le PS, pour la droite ou pour le FN. Et au bout du compte, ces abstentionnistes seront récupérés par les vainqueurs. 

    Oui, la réalité, c’est que pour changer la vie des travailleurs, il faut inverser le rapport de force entre les travailleurs et la bourgeoisie et cela, seules les luttes collectives peuvent le faire. Mais faute de pression collective et d'intervention directe des exploités sur ceux qui gouvernent, toute la vie politique se résume à cela. Même aux yeux de ceux qui n’y croient plus, les élections constituent les principales échéances de la vie politique. .

    Eh bien il faut que les travailleurs les utilisent, non pas pour faire de la politique politicienne, mais pour faire entendre leurs intérêts contre ceux du grand patronat. Pour affirmer leurs perspectives contre celles que veulent nous imposer les porte-parole de la bourgeoisie.

    L’issue que nous indiquons aux travailleurs peut sembler lointaine. Et en même temps, elle est inscrite dans la société elle-même. La lutte de classe n’est pas une invention des communistes révolutionnaires, c’est la vie elle-même et c’est le moteur de l’histoire. Les travailleurs ne resteront pas indéfiniment l’arme au pied. Alors il faut reconstruire, continuer de lever le drapeau communiste car tôt ou tard les travailleurs chercheront le chemin pour un avenir meilleur.   

    Je l’ai dit, nous sommes à contre-courant. Et dans ces élections nous ferons de petits scores. Mais c'est précisément lorsque les idées progressistes et révolutionnaires sont les moins en vogue, c’est lorsque la société va dans le sens contraire qu'il est important de les maintenir.

    Ce n’est pas la première fois que le mouvement ouvrier connaît un reflux. Il y en a eu bien d’autres, des périodes de guerre, de crise, de répression où le combat devenait si difficile que la grande majorité abandonnait et perdait confiance dans sa capacité à changer les choses. Des périodes où seule une minorité résistait, des moments mêmes où elle ne pouvait plus résister et où elle se cachait.

    Mais il y a toujours eu des femmes et des hommes qui ont conservé leurs idées et leurs convictions profondes et qui ont fini par les transmettre. Nous sommes les héritiers de ces minorités, les héritiers de leurs idées. Et nous devons avoir aussi leur courage, leur ténacité et leur dignité.

    Etre minoritaire n’est jamais une position commode. Mais encore une fois, lorsque la pourriture du capitalisme ressort par tous les pores de la société, il faut être là et dire que cela ne passera pas par nous. Lorsque les intellectuels cèdent au conformisme, aux préjugés, lorsqu’ils se laissent emporter par la vague nationaliste, identitaire comme aujourd’hui, lorsque les voix progressistes s’éteignent les unes après les autres, il est vital pour l’avenir d’affirmer nos idées révolutionnaires. 

    Ce qui nous caractérise, c’est cette confiance dans la classe ouvrière, cette confiance dans les exploités et donc cette confiance dans l’humanité. Cette idée que le capitalisme n’est qu’une étape dans l’histoire de l’humanité et qu’un jour nous en tournerons la page pour en écrire une nouvelle, autrement plus enthousiasmante.

    Alors, ne craignons pas d’être minoritaires, portons haut nos convictions et soyons-en fiers ! Et au travers de ces élections continuons d’avancer dans la voie qui est la nôtre, celle de participer à la reconstruction du camp des travailleurs.

    Alors je vous appelle à faire entendre le camp des travailleurs, à faire entendre les intérêts immédiats des travailleurs, l’interdiction des licenciements, l’augmentation des salaire et des pensions, le contrôle des comptes des groupes capitalistes comme Eddy l’a rappelé, mais aussi à faire entendre ce camp, profondément convaincu que l’avenir ne peut pas être ce monde hérissé de frontières et parsemé de dictatures féroces, ce monde où une minorité richissime emprisonne l’essentiel de l’humanité dans un océan de misère et de souffrances.

    Aidez nous à faire entendre la voix de ce camp, votez et à faites voter pour la liste LO faire entendre le camp des travailleurs. 

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