Centres de rétention : la loi du silence14/05/20252025Journal/medias/journalnumero/images/2025/05/une_2963-c.jpg.445x577_q85_box-0%2C5%2C1265%2C1645_crop_detail.jpg

Leur société

Centres de rétention : la loi du silence

Le Sénat a voté le 12 mai une loi visant à mettre fin à l’intervention d’associations humanitaires dans les centres de rétention administrative (CRA).

Elles y informent actuellement de leurs droits les migrants privés de liberté, un rôle inacceptable pour un gouvernement ayant fait des immigrés les boucs émissaires de tous les maux de la société.

Le premier de ces centres avait été créé en avril 1984. François Mitterrand était alors président de la République et Robert Badinter, ministre de la Justice. Depuis, leur nombre n’a cessé d’augmenter jusqu’à atteindre 26 aujourd’hui. Les hommes et les femmes qui y sont retenus se trouvent sous le coup d’une obligation de quitter le territoire français (OQTF), mais ont encore la possibilité de faire appel. L’aide que leur apportent dans cette démarche des associations comme la Cimade ou France Terre d’asile est une épine dans le pied du gouvernement, car bien des décisions d’expulsion sont légalement contestables. Elles ont été prises automatiquement, sans examen individuel, et aboutissent parfois à renvoyer les migrants dans des pays où ils risquent leur vie. Le prétexte de prétendues menaces à l’ordre public est invoqué de plus en plus souvent sans être en quoi que ce soit étayé, et finalement 44 % des migrants retenus en CRA qui franchissent le parcours d’obstacles pour faire appel sont libérés par le juge.

Autre contrariété pour le gouvernement, ces associations sont les seules à pouvoir informer le public de ce qui se passe dans ces centres où les conditions de rétention sont indignes. La Cimade, dans son rapport annuel, dénonce ainsi les locaux en sous- sol sans fenêtre ni cour extérieure à Bordeaux, et partout la multiplication des actes d’automutilation et les tentatives de suicide causées par le désespoir, ainsi que l’indifférence des autorités envers la situation sanitaire des personnes retenues. La Cour européenne des droits de l’homme a pour sa part condamné onze fois la France pour le placement d’enfants dans les CRA, un scandale qui continue.

Le gouvernement voudrait pouvoir agir en toute impunité, et la loi prétend remplacer les associations par l’OFII, l’Organisme français de l’immigration et de l’intégration, un organisme sous la tutelle du ministère de l’Intérieur. En matière d’opacité, on n’est jamais aussi bien servi que par soi-même.

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