Fin de vie : mourir mais surtout vivre dans la dignité13/03/20242024Journal/medias/journalnumero/images/2024/03/2902.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Fin de vie

mourir mais surtout vivre dans la dignité

Après des mois de tergiversations, Macron a rendu public ses projets pour une loi sur la fin de vie. Examinée au Parlement à partir de la fin mai, elle ouvrirait la possibilité d’une forme de suicide assisté, dans des cas restreints et encadrés.

Cette loi est attendue depuis longtemps par les associations militant pour le droit à mourir dans la dignité. Elle sera un prolongement de la loi Creys-Leonetti de 2016 supposée garantir « le droit du patient à une sédation profonde et continue jusqu’au décès », pour soulager la fin de vie sans donner la mort. La loi de 2016 était déjà la révision d’une première loi Leonetti, votée en 2005, qui donnait aux malades incurables le droit de refuser tout acharnement thérapeutique. La première loi du genre, encore plus limitée, avait été votée en 1999.

Ces lois ont été adoptées après des cas médiatisés de personnes plongées dans un coma irréversible comme Vincent Lambert, ou des procès de médecins qui avaient assumé d’abréger les souffrances de leurs patients, comme le docteur Bonnemaison. Ces lois, qui accordaient des droits légitimes à des personnes incurables sans les imposer à personne, ont été combattues par les Églises de diverses obédiences et les associations « pro-vie » qui veulent imposer leur conception du monde à toute la société.

Contrairement à plusieurs pays d’Europe, la loi française actuelle n’autorise pas l’aide active à mourir par injection d’une substance létale. La Suisse, le Portugal et la Belgique autorisent le suicide assisté, tandis que les Pays-Bas, l’Espagne et le Luxembourg permettent une forme d’euthanasie par un tiers. La loi proposée par Macron ne représente donc pas une révolution. Tout en ayant fait régresser les droits sociaux, Macron voudrait apparaître comme progressiste sur le terrain sociétal. Mais comme, en même temps, il veut ménager les hiérarchies religieuses, sa nouvelle loi va surtout servir à masquer la grande misère des services de soins palliatifs ou de gériatrie.

Car, s’il peut être compréhensible et légitime de vouloir mourir quand toutes les thérapies ont été tentées ou que la souffrance est insupportable, il faudrait avant tout permettre à tous d’accéder aux meilleurs traitements disponibles et aux soins palliatifs les plus efficaces. En décembre dernier, des médecins dénonçaient « des soins palliatifs au bord de l’effondrement ». Année après année, des plans d’urgence sont annoncés par les ministres sans que les moyens suivent. Macron lui-même admet qu’il n’existe aucun service de soins palliatifs dans 21 départements.

Dans les hôpitaux, même quand on peut accéder à une technologie performante, ce qui n’est pas possible dans toutes les villes, il manque partout du personnel pour prendre le temps de soulager ne serait-ce que la douleur morale des mourants. Et que dire des Ehpad, en particulier les Ehpad privés à but lucratif, dans lesquels les anciens en fin de vie sont si maltraités que souvent ils aspirent à mourir au plus vite.

Alors, si le droit de mourir dans la dignité devrait être accordé à chacun, il faut d’abord imposer le droit de vivre dignement, que l’on soit jeune ou ancien, en bonne ou en mauvaise santé. Mais pour obtenir cette dignité-là, il ne suffira pas d’une loi : il faut en finir avec un système dominé par la recherche permanente du profit.

Partager